2007年12月1日土曜日

Un navire de guerre chinois fait escale au Japon en "messager de paix"

Un navire de guerre chinois fait escale au Japon en "messager de paix"
LE MONDE | 29.11.07 | 13h52 • Mis à jour le 29.11.07 | 13h52
TOKYO CORRESPONDANCE


REUTERS/Toru Hanai
L'amarrage au quai Harumi, à Tokyo, d'un navire de guerre chinois ferait escale en tant que "messager de paix".


L'amarrage au quai Harumi, sur la baie de Tokyo, du destroyer lance-missile chinois Shenzhen, témoigne du réchauffement des relations sino-japonaises. Arrivé le 28 novembre, le bâtiment, avec ses 350 hommes d'équipage, doit rester quatre jours dans l'archipel. Il s'agit de la première escale d'un navire de guerre chinois au Japon depuis 1934.

Décidée le 30 août par les ministres de la défense des deux pays, la venue du Shenzhen a été saluée par l'amiral Eiji Yoshikawa, chef d'état-major des forces maritimes japonaises d'autodéfense (FAD), comme "le symbole des progrès accomplis dans les relations militaires avec la Chine". La visite d'un bateau des FAD en Chine est déjà programmée.

Qualifiant le Shenzhen de "messager de paix", l'ambassadeur de Chine au Japon, Cui Tiankai, a précisé que son pays "suivait la voie de la paix et du partenariat". Ces propos contrastent avec la tension qui caractérisait les relations bilatérales quand Junichiro Koizumi dirigeait le gouvernement nippon, de 2001 à 2006. Nationaliste par opportunisme, il avait axé sa diplomatie sur une entente forte avec Washington. Il avait également multiplié les visites au sanctuaire Yasukuni, où sont honorées, entre autres, les âmes de dirigeants japonais condamnés pour crimes de guerre. Ses choix avaient éloigné le Japon de ses voisins chinois et coréen.

Devenu premier ministre en septembre 2006, Shinzo Abe, pourtant nationaliste de coeur, avait tempéré cette vision unilatérale en effectuant, le mois suivant, une visite officielle à Séoul et à Pékin. Son successeur, Yasuo Fukuda, critique de la politique américaine en Irak, souhaite, lui aussi, de meilleures relations avec la Chine et doit se rendre dans ce pays début 2008.

MÉFIANCE PERSISTANTE

L'entente Tokyo-Pékin reste cependant emprunte de méfiance. Outre les différends sur les questions historiques et sur l'exploitation de gisements gaziers en mer de Chine orientale, le Japon s'inquiète de l'opacité des dépenses militaires chinoises. Selon l'édition 2007 du Livre blanc sur la défense, elles ont été multipliées par seize en dix-neuf ans. L'ex-ministre japonais de la défense, Masahiko Koumura, a affirmé, le 30 août, que "la question de la transparence des dépenses d'armement sera abordée à chaque rencontre". Pour le contre-amiral Xiao Xinnian, il n'y a pas de quoi s'inquiéter : "Quels que soient les problèmes rencontrés, je pense que nous pouvons les résoudre de façon pacifique", a-t-il déclaré à bord du Shenzhen.

Philippe Mesmer
Article paru dans l'édition du 30.11.07.

 

La Chine résiste aux pressions de l'UE sur le yuan

La Chine résiste aux pressions de l'UE sur le yuan
LE MONDE | 29.11.07 | 13h50 • Mis à jour le 29.11.07 | 13h50
PÉKIN, BRUXELLES CORRESPONDANTS

Doug Scott/GAMMA
Les Européens demandent à la Chine d'améliorer son dispositif de contrôle concernant les produits du "made in China".


Le déficit commercial et les taux de change ont dominé le sommet entre la Chine et l'Union européenne (UE), organisé à Pékin mercredi 28 novembre. Sur fond de tensions de plus en plus vives au sujet du déséquilibre des échanges sino-européens, peu de résultats concrets ont été enregistrés.

Après Nicolas Sarkozy en début de semaine, les principaux dirigeants de l'Union monétaire ont, dans une démarche inédite pour la zone euro, demandé à la Chine de faire un geste afin de corriger la sous-évaluation du yuan. Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Trichet, patron de la Banque centrale européenne, et Joaquin Almunia, commissaire en charge des affaires économiques et monétaires, se sont entretenus mercredi, avec le ministre des finances, Xie Xuren, et le premier ministre chinois, Wen Jiabao. La veille, ils avaient eu rendez-vous avec les responsables de la Banque populaire de Chine. A l'instar du président français, les pays de la zone euro déplorent depuis deux mois la sous-évaluation du yuan chinois.

Ce dernier, qui varie chaque jour autour d'un cours pivot fixé par les autorités monétaires, a eu tendance, ces derniers mois à se déprécier face à la monnaie unique, alors qu'il progressait, sous pression de Washington, par rapport au dollar. S'ils affirment comprendre les soucis européens, les dirigeants chinois n'excluent pas de faire preuve de davantage de flexibilité dans leur politique de change, mais de manière toujours très "graduelle", pour ne pas handicaper leurs exportations. Il a néanmoins été convenu de créer un "groupe de travail" afin de mener, au niveau des banques centrales, des consultations régulières sur les questions monétaires. Faute de correction, M. Juncker a mis en garde contre "un retour du protectionnisme" en Europe.

La pression exercée par les Européens se veut d'autant plus forte que le déficit commercial avec la Chine se creuse à toute allure. Après 130 milliards d'euros en 2006, le déséquilibre des échanges avec cette puissance émergente, devenue en une décennie le deuxième partenaire commercial de l'Europe, pourrait atteindre 170 milliards cette année. "L'Union européenne exporte moins en Chine qu'en Suisse, qui est un pays de 7 millions d'habitants !", s'est plaint le président de la Commission, José Manuel Barroso, en marge du sommet. "La Chine dispose d'un accès sans obstacle aux marchés européens. Nous voudrions progressivement obtenir la même chose sur les marchés chinois", a demandé Peter Mandelson. D'habitude très prudent à l'égard de Pékin, le commissaire en charge du commerce ne cache plus la "frustration" suscitée par l'attitude de la partie chinoise.

RÉPUTATION DU "MADE IN CHINA"

Plutôt sourde à ces appels ces derniers mois, la Chine s'est néanmoins montrée prête à travailler de concert avec l'Europe afin de rééquilibrer la balance commerciale. Le premier ministre, Wen Jiabao, s'est dit "très concerné" par les récriminations européennes. Un "mécanisme" de consultation a également été annoncé.

La question des déficits commerciaux est devenue encore plus sensible, vue d'Europe, à la suite des interrogations suscitées par le retrait de produits fabriqués en Chine par le groupe américain Mattel. Préoccupés, les Européens demandent à à la Chine d'améliorer son dispositif de contrôle, et mettent en garde contre l'impact de cette crise sur la réputation du "made in China". Ils entendent profiter de l'occasion pour demander de nouveaux efforts dans la lutte contre la contrefaçon, qui empoisonne l'existence des entreprises européennes en Chine. La vice-premier ministre chinois, Wu Yi, a dénoncé avant le sommet la "politisation" de ce dossier.

Bruno Philip et Philippe Ricard
Article paru dans l'édition du 30.11.07.

 

Les audaces réformatrices du dalaï-lama

Les audaces réformatrices du dalaï-lama
LE MONDE | 28.11.07 | 14h14 • Mis à jour le 28.11.07 | 14h14


AP/CALEB JONES
Le dalaï-lama lors de sa visite à Washington, le 16 octobre 2007.


Le dalaï-lama prêt à bousculer la tradition tibétaine face à un régime chinois se drapant dans l'orthodoxie du bouddhisme lamaïque : le conflit historique entre le Tibet et Pékin, né de l'occupation du "Toit du monde" par l'armée chinoise, en 1950-1951, est en train de verser dans le paradoxe. C'est en effet à fronts renversés que s'est engagée, ces derniers jours, la bataille pour la succession de Tenzin Gyatso, XIVe dalaï-lama, exilé à Dharamsala (Inde) après sa fuite du Tibet en 1959. Le tout sur fond de grandes manoeuvres de Pékin pour affermir son contrôle politique sur le bouddhisme tibétain.

Agé de 72 ans, le chef politique et spirituel des Tibétains redoute que le pouvoir chinois pèse lourdement sur le choix de son successeur, afin d'en faire un obligé. Aussi cherche-t-il à trouver la parade, quitte à contourner les procédures rituelles de l'institution lamaïque. En visite, mardi 27 novembre, à Amritsar, dans l'Etat indien du Pendjab, le dalaï-lama a laissé entendre que le mode de désignation de son successeur pourrait évoluer. Il a évoqué un type de sélection ressemblant à "l'élection du pape" et même un "possible" référendum auquel participeraient "des centaines de milliers de Tibétains".

RUPTURE AVEC LA TRADITION

Ces propositions marquent une rupture avec la tradition du bouddhisme tibétain, en vertu de laquelle tout nouveau dalaï-lama, censé être la réincarnation de son prédécesseur, est un garçonnet identifié par des "oracles officiels" et des "lamas érudits" en testant ses réactions face à des objets ayant appartenu au défunt. Autre innovation : le chef tibétain n'exclut pas que sa "réincarnation" ait lieu "en dehors du Tibet", compte tenu de l'importance de la communauté tibétaine vivant en exil.

Lors d'une visite au Japon, le 20 novembre, il avait déjà pris ses distances avec la tradition en évoquant l'idée que son successeur pourrait être choisi "avant" sa propre mort. A Amritsar, il est allé encore plus loin, affirmant à la BBC : "Si le peuple tibétain décide que l'institution du dalaï-lama n'est plus pertinente, alors elle cessera automatiquement d'exister." Face à l'ardeur réformatrice du dalaï-lama, le régime de Pékin a eu beau jeu de l'accuser, mardi, de "violer les rituels et les conventions historiques".

Frédéric Bobin
Article paru dans l'édition du 29.11.07.