2007年12月1日土曜日

Un navire de guerre chinois fait escale au Japon en "messager de paix"

Un navire de guerre chinois fait escale au Japon en "messager de paix"
LE MONDE | 29.11.07 | 13h52 • Mis à jour le 29.11.07 | 13h52
TOKYO CORRESPONDANCE


REUTERS/Toru Hanai
L'amarrage au quai Harumi, à Tokyo, d'un navire de guerre chinois ferait escale en tant que "messager de paix".


L'amarrage au quai Harumi, sur la baie de Tokyo, du destroyer lance-missile chinois Shenzhen, témoigne du réchauffement des relations sino-japonaises. Arrivé le 28 novembre, le bâtiment, avec ses 350 hommes d'équipage, doit rester quatre jours dans l'archipel. Il s'agit de la première escale d'un navire de guerre chinois au Japon depuis 1934.

Décidée le 30 août par les ministres de la défense des deux pays, la venue du Shenzhen a été saluée par l'amiral Eiji Yoshikawa, chef d'état-major des forces maritimes japonaises d'autodéfense (FAD), comme "le symbole des progrès accomplis dans les relations militaires avec la Chine". La visite d'un bateau des FAD en Chine est déjà programmée.

Qualifiant le Shenzhen de "messager de paix", l'ambassadeur de Chine au Japon, Cui Tiankai, a précisé que son pays "suivait la voie de la paix et du partenariat". Ces propos contrastent avec la tension qui caractérisait les relations bilatérales quand Junichiro Koizumi dirigeait le gouvernement nippon, de 2001 à 2006. Nationaliste par opportunisme, il avait axé sa diplomatie sur une entente forte avec Washington. Il avait également multiplié les visites au sanctuaire Yasukuni, où sont honorées, entre autres, les âmes de dirigeants japonais condamnés pour crimes de guerre. Ses choix avaient éloigné le Japon de ses voisins chinois et coréen.

Devenu premier ministre en septembre 2006, Shinzo Abe, pourtant nationaliste de coeur, avait tempéré cette vision unilatérale en effectuant, le mois suivant, une visite officielle à Séoul et à Pékin. Son successeur, Yasuo Fukuda, critique de la politique américaine en Irak, souhaite, lui aussi, de meilleures relations avec la Chine et doit se rendre dans ce pays début 2008.

MÉFIANCE PERSISTANTE

L'entente Tokyo-Pékin reste cependant emprunte de méfiance. Outre les différends sur les questions historiques et sur l'exploitation de gisements gaziers en mer de Chine orientale, le Japon s'inquiète de l'opacité des dépenses militaires chinoises. Selon l'édition 2007 du Livre blanc sur la défense, elles ont été multipliées par seize en dix-neuf ans. L'ex-ministre japonais de la défense, Masahiko Koumura, a affirmé, le 30 août, que "la question de la transparence des dépenses d'armement sera abordée à chaque rencontre". Pour le contre-amiral Xiao Xinnian, il n'y a pas de quoi s'inquiéter : "Quels que soient les problèmes rencontrés, je pense que nous pouvons les résoudre de façon pacifique", a-t-il déclaré à bord du Shenzhen.

Philippe Mesmer
Article paru dans l'édition du 30.11.07.

 

La Chine résiste aux pressions de l'UE sur le yuan

La Chine résiste aux pressions de l'UE sur le yuan
LE MONDE | 29.11.07 | 13h50 • Mis à jour le 29.11.07 | 13h50
PÉKIN, BRUXELLES CORRESPONDANTS

Doug Scott/GAMMA
Les Européens demandent à la Chine d'améliorer son dispositif de contrôle concernant les produits du "made in China".


Le déficit commercial et les taux de change ont dominé le sommet entre la Chine et l'Union européenne (UE), organisé à Pékin mercredi 28 novembre. Sur fond de tensions de plus en plus vives au sujet du déséquilibre des échanges sino-européens, peu de résultats concrets ont été enregistrés.

Après Nicolas Sarkozy en début de semaine, les principaux dirigeants de l'Union monétaire ont, dans une démarche inédite pour la zone euro, demandé à la Chine de faire un geste afin de corriger la sous-évaluation du yuan. Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Trichet, patron de la Banque centrale européenne, et Joaquin Almunia, commissaire en charge des affaires économiques et monétaires, se sont entretenus mercredi, avec le ministre des finances, Xie Xuren, et le premier ministre chinois, Wen Jiabao. La veille, ils avaient eu rendez-vous avec les responsables de la Banque populaire de Chine. A l'instar du président français, les pays de la zone euro déplorent depuis deux mois la sous-évaluation du yuan chinois.

Ce dernier, qui varie chaque jour autour d'un cours pivot fixé par les autorités monétaires, a eu tendance, ces derniers mois à se déprécier face à la monnaie unique, alors qu'il progressait, sous pression de Washington, par rapport au dollar. S'ils affirment comprendre les soucis européens, les dirigeants chinois n'excluent pas de faire preuve de davantage de flexibilité dans leur politique de change, mais de manière toujours très "graduelle", pour ne pas handicaper leurs exportations. Il a néanmoins été convenu de créer un "groupe de travail" afin de mener, au niveau des banques centrales, des consultations régulières sur les questions monétaires. Faute de correction, M. Juncker a mis en garde contre "un retour du protectionnisme" en Europe.

La pression exercée par les Européens se veut d'autant plus forte que le déficit commercial avec la Chine se creuse à toute allure. Après 130 milliards d'euros en 2006, le déséquilibre des échanges avec cette puissance émergente, devenue en une décennie le deuxième partenaire commercial de l'Europe, pourrait atteindre 170 milliards cette année. "L'Union européenne exporte moins en Chine qu'en Suisse, qui est un pays de 7 millions d'habitants !", s'est plaint le président de la Commission, José Manuel Barroso, en marge du sommet. "La Chine dispose d'un accès sans obstacle aux marchés européens. Nous voudrions progressivement obtenir la même chose sur les marchés chinois", a demandé Peter Mandelson. D'habitude très prudent à l'égard de Pékin, le commissaire en charge du commerce ne cache plus la "frustration" suscitée par l'attitude de la partie chinoise.

RÉPUTATION DU "MADE IN CHINA"

Plutôt sourde à ces appels ces derniers mois, la Chine s'est néanmoins montrée prête à travailler de concert avec l'Europe afin de rééquilibrer la balance commerciale. Le premier ministre, Wen Jiabao, s'est dit "très concerné" par les récriminations européennes. Un "mécanisme" de consultation a également été annoncé.

La question des déficits commerciaux est devenue encore plus sensible, vue d'Europe, à la suite des interrogations suscitées par le retrait de produits fabriqués en Chine par le groupe américain Mattel. Préoccupés, les Européens demandent à à la Chine d'améliorer son dispositif de contrôle, et mettent en garde contre l'impact de cette crise sur la réputation du "made in China". Ils entendent profiter de l'occasion pour demander de nouveaux efforts dans la lutte contre la contrefaçon, qui empoisonne l'existence des entreprises européennes en Chine. La vice-premier ministre chinois, Wu Yi, a dénoncé avant le sommet la "politisation" de ce dossier.

Bruno Philip et Philippe Ricard
Article paru dans l'édition du 30.11.07.

 

Les audaces réformatrices du dalaï-lama

Les audaces réformatrices du dalaï-lama
LE MONDE | 28.11.07 | 14h14 • Mis à jour le 28.11.07 | 14h14


AP/CALEB JONES
Le dalaï-lama lors de sa visite à Washington, le 16 octobre 2007.


Le dalaï-lama prêt à bousculer la tradition tibétaine face à un régime chinois se drapant dans l'orthodoxie du bouddhisme lamaïque : le conflit historique entre le Tibet et Pékin, né de l'occupation du "Toit du monde" par l'armée chinoise, en 1950-1951, est en train de verser dans le paradoxe. C'est en effet à fronts renversés que s'est engagée, ces derniers jours, la bataille pour la succession de Tenzin Gyatso, XIVe dalaï-lama, exilé à Dharamsala (Inde) après sa fuite du Tibet en 1959. Le tout sur fond de grandes manoeuvres de Pékin pour affermir son contrôle politique sur le bouddhisme tibétain.

Agé de 72 ans, le chef politique et spirituel des Tibétains redoute que le pouvoir chinois pèse lourdement sur le choix de son successeur, afin d'en faire un obligé. Aussi cherche-t-il à trouver la parade, quitte à contourner les procédures rituelles de l'institution lamaïque. En visite, mardi 27 novembre, à Amritsar, dans l'Etat indien du Pendjab, le dalaï-lama a laissé entendre que le mode de désignation de son successeur pourrait évoluer. Il a évoqué un type de sélection ressemblant à "l'élection du pape" et même un "possible" référendum auquel participeraient "des centaines de milliers de Tibétains".

RUPTURE AVEC LA TRADITION

Ces propositions marquent une rupture avec la tradition du bouddhisme tibétain, en vertu de laquelle tout nouveau dalaï-lama, censé être la réincarnation de son prédécesseur, est un garçonnet identifié par des "oracles officiels" et des "lamas érudits" en testant ses réactions face à des objets ayant appartenu au défunt. Autre innovation : le chef tibétain n'exclut pas que sa "réincarnation" ait lieu "en dehors du Tibet", compte tenu de l'importance de la communauté tibétaine vivant en exil.

Lors d'une visite au Japon, le 20 novembre, il avait déjà pris ses distances avec la tradition en évoquant l'idée que son successeur pourrait être choisi "avant" sa propre mort. A Amritsar, il est allé encore plus loin, affirmant à la BBC : "Si le peuple tibétain décide que l'institution du dalaï-lama n'est plus pertinente, alors elle cessera automatiquement d'exister." Face à l'ardeur réformatrice du dalaï-lama, le régime de Pékin a eu beau jeu de l'accuser, mardi, de "violer les rituels et les conventions historiques".

Frédéric Bobin
Article paru dans l'édition du 29.11.07.

 

2007年11月28日水曜日

La ville sud-coréenne de Yeosu organisera l'Exposition internationale de 2012

La ville sud-coréenne de Yeosu organisera l'Exposition internationale de 2012
LE MONDE | 27.11.07 | 13h22 • Mis à jour le 27.11.07 | 13h22


Le premier ministre sud-coréen Han Duck Soo, venu défendre son pays, s'est félicité d'une élection "transparente" et a promis que la Corée "ferait tout pour mériter la confiance" du Bureau international des expositions (BIE). Soulignant l'actualité du thème retenu par Yeosu - la protection des océans et des côtes -, M. Soo a promis que son pays jouerait "un rôle actif d'intermédiaire" envers les pays en développement dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Le résultat du vote a été salué par des cris de joie de la délégation sud-coréenne, tandis que certains membres du projet Tanger, donné un temps favori, s'effondraient en larmes.

La Pologne a contesté l'organisation du vote, en soulignant l'afflux d'adhésions de dernière minute au BIE. Au Maroc, la déception et l'amertume dominent. Le premier ministre, Abbas El-Fassi, a exprimé sa tristesse, sitôt l'annonce du vote. "C'est une mauvaise nouvelle, une déception pour l'Afrique, le monde arabo-musulman. En élisant Tanger, (le BIE) aurait donné un coup de main pour mettre fin à la pauvreté, promouvoir les droits de l'homme et le développement de la richesse dans notre pays", a-t-il déclaré.

Un peu moins prestigieuses que les expositions universelles, les expositions internationales représentent un enjeu économique important pour le pays hôte, en termes de contrats, d'échanges et de créations d'emplois.

Elles sont organisées en alternance avec les expositions universelles qui ont lieu tous les cinq ans. Elles ont un thème précis et durent trois mois, contre six mois pour les universelles. - (AFP.)

Article paru dans l'édition du 28.11.07.

 

Les "avocats aux pieds nus" réprimés en Chine

Les "avocats aux pieds nus" réprimés en Chine
LE MONDE | 27.11.07 | 13h18 • Mis à jour le 27.11.07 | 13h19
SHANGHAÏ CORRESPONDANT


Neal & Molly Jansen
Concernant les droits de l'homme en Chine, les autorités imposent le silence à une mouvance de juristes autodidactes.


La visite de Nicolas Sarkozy en Chine, dimanche 25, lundi 26 et mardi 27 novembre, intervient alors que le mouvement des droits civiques, et les "avocats aux pieds nus" qui l'animent, traverse une phase particulièrement critique. Bien que la réunion du 17e Congrès, période traditionnellement sensible, soit achevée depuis un mois, ce réseau informel de juristes, avocats et militants, qui ont entrepris de défendre, sur le terrain, des cas d'injustices en s'en référant aux lois en vigueur, n'a jamais été en si mauvaise posture.

Yang Maodong (alias Guo Feixiong), l'un des juristes qui s'étaient illustrés lors des événements de Taishi dans le Guangdong en 2005, un village dont la population avait tenté de manière non violente de révoquer par un vote un chef du village corrompu, comme la loi chinoise le permet, a été condamné à Canton, le 14 novembre, à cinq ans de prison. Son crime ? La publication "illégale" d'un livre sur une affaire de corruption à Shenyang (Nord-Est).

A Pékin, le militant Hu Jia, assigné à résidence depuis de longs mois, s'est fait rosser lorsqu'il a tenté de sortir de chez lui, le 9 novembre, pour se rendre à la clinique où sa femme, l'activiste Zeng Jinyan, accouchait. Gao Zhisheng, l'un des pionniers de la mouvance, plusieurs fois emprisonné et battu, rayé du barreau, est comme "paralysé". On l'a prévenu qu'il en allait de la survie de sa famille.

Dans la région de Shanghaï, Wu Lihong a perdu, début novembre, le seul appel auquel il avait droit dans la mascarade de procès qui a condamné cet écologiste local à quatre ans de prison pour une prétendue "fraude". Wu Lihong se battait depuis dix ans pour la préservation du lac Taihu. Son épouse a pu le voir pour la première fois vendredi 23 novembre. En revanche, Yuan Weijing, la femme de l'activiste aveugle Chen Guangcheng, embastillé dans le Shandong, n'a pas été autorisée à rendre visite à son mari depuis deux mois.

ENNEMIS DU PEUPLE

Pour les "avocats aux pieds nus", qui n'ont jamais contesté le système politique, cette mise au pas est d'autant plus cynique qu'elle s'effectue par le biais de procès manipulés. Paradoxalement, explique en substance Jean-Philippe Béja, spécialiste des mouvements politiques chinois au Centre d'études et de recherches internationales (CERI), ce sont les campagnes du gouvernement en faveur du "respect des lois" qui ont encouragé ces hommes, parfois autodidactes, à entrer en action. Décidés à prendre au mot le parti, ils sont convaincus d'une convergence d'intérêts entre leur action et celle des nouveaux dirigeants - le président Hu Jintao et le premier ministre Wen Jiabao -, qui proclament leur attention pour les groupes vulnérables de la société.

Depuis quelques mois, les "avocats aux pieds nus" sont ouvertement étiquetés "ennemis du peuple". On voit ressortir les accusations d'agents de l'étranger. Minjian, une publication de l'université Sun Yat-Sen à Canton qui couvrait les combats des militants et des ONG pour un lectorat confidentiel, a été fermée après trois ans d'existence. Dans une longue lettre publiée le 22 novembre sur Internet, Zhai Minglei, son fondateur, a exprimé la "pitié" qu'il ressent pour cette société civile chinoise mort-née. Parce qu'elle est tant menacée, celle-ci a besoin de soutien, comme celui dont a fait montre la chancelière allemande Angela Merkel en rencontrant, lors de sa venue à Pékin, fin août, quatre intellectuels en rupture de banc. Parmi eux figurait le journaliste Li Datong, limogé en 2006, un des observateurs les plus lucides du système.

Avant la visite de M. Sarkozy en Chine, la France a, certes, soumis aux autorités chinoises une liste de personnalités emprisonnées, qui n'a pas été rendue publique. Mais, contrat oblige, le président français a fait le choix de rencontrer essentiellement des officiels et des patrons.

Brice Pedroletti
Article paru dans l'édition du 28.11.07.



Rachida Dati rencontre deux avocats chinois

Si Nicolas Sarkozy n'a pas rencontré de contestataires lors de sa visite en Chine, la ministre française de la justice, Rachida Dati, s'est entretenue, lundi 26 novembre à Pékin, avec deux avocats chinois, Mo Shaoping et Li Jinsong, défenseurs de la liberté d'expression dans un contexte de plus en plus lourd pour les militants des droits de l'homme. Ces deux avocats recevront deux des cinq prix décernés annuellement par la Commission nationale consultative des droits de l'homme, a-t-on annoncé dans l'entourage du président français. Le thème retenu cette année était "la liberté d'opinion, d'expression et d'information". Les deux avocats chinois ont été choisis pour avoir "mené des actions en faveur de la liberté d'opinion".
 
 

Devant les étudiants pékinois, Nicolas Sarkozy exalte la "croissance propre"

Devant les étudiants pékinois, Nicolas Sarkozy exalte la "croissance propre"
LE MONDE | 27.11.07 | 13h18
PÉKIN ENVOYÉS SPÉCIAUX

"Soyez un modèle de développement durable, pas une caricature de développement !" Poursuivant son voyage en Chine, mardi 27 novembre, Nicolas Sarkozy a profité d'un discours prononcé devant les étudiants de la prestigieuse université pékinoise de Qinghua pour adresser un nouveau message fort à la Chine, qui sera bientôt la nation la plus polluante de la planète.


Au lendemain de la signature avec son homologue, Hu Jintao, d'une déclaration conjointe sur la lutte contre les changements climatiques, le président de la République a exhorté les Chinois à investir pour réduire les émissions de gaz liées à leur croissance économique et à s'orienter vers un modèle de développement durable : "Nous ne disons pas à la Chine : ayez moins de croissance. Nous disons : ayez plus de croissance mais propre..."

Le chef de l'Etat a de nouveau insisté, comme il le fait depuis le début de sa visite, sur la notion de "partenariat" avec une Chine qui doit prendre ses "responsabilités" de manière à prolonger avec elle une relation "gagnant-gagnant". Dans cette optique, même si M. Sarkozy affirme qu'en matière de dégradation de l'environnement et d'industrialisation aveugle son "pays a commis des erreurs, il n'y a pas de raison que vous commettiez les mêmes erreurs", demandant aux Chinois de se "préoccuper de ce qui se passe au-delà de (leurs) frontières". "Comme vous êtes plus grands et plus puissants, vous devez prendre plus de responsabilités que les autres", a-t-il lancé.

Devant une salle de jeunes qui l'ont applaudi à tout rompre à son arrivée, Nicolas Sarkozy a autant manié le compliment sur la "Chine éternelle" et les qualités dont elle a su faire preuve au cours de son histoire, qu'il a su agiter la menace du carton rouge au cas où la République populaire refuse de jouer le jeu d'un effort mondial, car, dit-il, la pollution ne connaît "pas de frontières".

Le chef de l'Etat a ainsi prévenu qu'il "défendrait le principe d'une taxe de compensation carbone aux frontières de l'Union européenne à l'égard des pays qui ne se doteraient pas de règles contraignantes de réduction de gaz à effet de serre. Chers amis de la Chine, ce ne serait pas juste que les producteurs européens soient sanctionnés, que le travail en Europe soit pénalisé et découragé uniquement parce que les engagements pris par l'UE pour lutter contre les changements climatiques resteraient unilatéraux".

Au passage, et après avoir évoqué le fait qu'en Chine aussi l'opinion publique proteste contre l'environnement dégradé, il a glissé devant les étudiants d'un pays où l'impunité des dirigeants est la règle que, lui, est le "chef de l'Etat d'un pays démocratique où les responsables doivent rendre des comptes".

Pour M. Sarkozy, en tout cas, les Chinois ont désormais les moyens d'une politique soucieuse de l'environnement : "Vous savez. Vous pouvez. Maintenant dites au monde que vous voulez !"

Natalie Nougayrède et Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 28.11.07.

 

 

Nicolas Sarkozy demande à la Chine "d'accélérer l'appréciation de sa monnaie"

Nicolas Sarkozy demande à la Chine "d'accélérer l'appréciation de sa monnaie"
LEMONDE.FR avec Reuters | 26.11.07 | 14h31 • Mis à jour le 26.11.07 | 14h33


AFP/ERIC FEFERBERG
"Il faut arriver à des taux de change harmonieux et justes qui bénéficieront à l'économie mondiale", a déclaré le président français, à l'issue de la signature d'environ 20 milliards d'euros de contrats.


Nicolas Sarkozy a bousculé, lundi 26 novembre, le cadre formel des visites d'Etat à Pékin, en rappelant publiquement la Chine à ses devoirs de grande puissance, notamment en matière monétaire. "Il faut arriver à des taux de change harmonieux et justes qui bénéficieront à l'économie mondiale", a ainsi déclaré le président français, à l'issue de la signature d'environ 20 milliards d'euros de contrats entre des entreprises françaises et la Chine, dans le cadre massif du Grand Palais du Peuple.

"Ceci implique, dans l'intérêt même de la Chine, d'accélérer l'appréciation de sa monnaie vis-à-vis de l'euro." Le président chinois Hu Jintao s'est déclaré prêt à discuter de la valeur du yuan, a affirmé le porte-parole de l'Elysée. "Il a dit qu'il était disposé à avoir un dialogue approfondi à haut niveau sur ce sujet (...) ce qui est vraiment une grande première", a expliqué David Martinon à des journalistes.

"COOPÉRATION PLUTÔT QU'AFFRONTEMENT STÉRILE"

Le président français a réaffirmé qu'il souhaitait en outre le développement de relations "harmonieuses" dans des domaines comme la sécurité des investissements, la sûreté des produits, le respect de la propriété intellectuelle et la lutte contre la contrefaçon. "Nous allons faire de ces questions des thèmes de coopération plutôt que d'affrontement stérile", a-t-il dit. Il a émis l'espoir que des "progrès concrets" soient faits dans la recherche de "solutions amiables" dans les contentieux opposant les groupes français Danone et Schneider à leurs associés chinois sur des questions de propriété intellectuelle. Le président chinois Hu Jintao, assis à quelques mètres de lui, est resté impassible, le regard fixe.

Aucune réaction non plus quand Nicolas Sarkozy a évoqué la situation des droits de l'homme en Chine. "J'ai relevé les progrès depuis 30 ans dans ce domaine et rappelé l'attachement de la France à des progrès supplémentaires, en particulier pour l'Etat de droit dans le domaine judiciaire, l'activité des journalistes et la peine de mort", a déclaré le président français. Le protocole chinois ne prévoyait pas de conférence de presse mais deux déclarations successives des présidents français et chinois, après deux heures d'entretiens et la cérémonie de signature des contrats.

 
 

2007年11月26日月曜日

Nicolas Sarkozy a entamé sa visite en Chine par une escale culturelle

Nicolas Sarkozy a entamé sa visite en Chine par une escale culturelle
LEMONDE.FR avec Reuters et AFP | 25.11.07 | 12h22 • Mis à jour le 25.11.07 | 15h04

REUTERS/PHILIPPE WOJAZER
Nicolas Sarkozy devantdes soldats de terre au mausolée du premier empereur de Chine, Qin Shi Huangdi, dimanche 25 novembre?


Le président français, Nicolas Sarkozy, est arrivé dimanche 25 novembre à Xian, ancienne capitale impériale et première étape de sa visite d'Etat de trois jours en Chine.

Il y est resté seulement trois heures et demie, durant lesquelles il a visité deux des trésors de la civilisation chinoise. Le premier, le mausolée du premier empereur de Chine, Qin Shi Huangdi (259-221 av. JC), est célèbre pour son armée de 8 000 soldats et chevaux de terre cuite. Le second, la sépulture de Liu Qi, quatrième empereur de la dynastie Han mort vers 141 av. JC, est riche d'innombrables figurines de terre cuite (hommes, femmes, oeunuques et animaux), qui constituent un véritable document en trois dimensions de la vie à la cour impériale.

Aux côtés de Nicolas Sarkozy, se trouvaient notamment sa mère Andrée et l'un de ses fils, Pierre.

Il devait ensuite gagner Pékin pour un premier entretien avec le président Hu Jintao en dîner restreint. Lundi, Nicolas Sarkozy et Hu Jintao présideront la signature d'importants contrats, qui pourrait s'élever à quelque 20 milliards de dollars.

 

A Pékin, Nicolas Sarkozy plaide pour une réévaluation du yuan

A Pékin, Nicolas Sarkozy plaide pour une réévaluation du yuan
LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 25.11.07 | 15h03 • Mis à jour le 26.11.07 | 05h46

REUTERS/POOL
Le président chisois Hu Jintao a accueilli, le 25 novembre, Nicolas Sarkozy à son arrivée à Pékin.

REUTERS/PHILIPPE WOJAZER
Nicolas Sarkozy, le 25 novembre à Pékin, devant la Chambre de commerce française en Chine.


Arrivé dimanche 25 novembre à Pékin pour un voyage de trois jours, Nicolas Sarkozy a entamé son séjour par une visite à la Chambre de commerce française en Chine. Dans un discours devant des responsables d'entreprises françaises, le chef de l'Etat a appelé la Chine à "prendre toute sa part" dans la résolution des grandes questions internationales, sur les dossiers diplomatiques ou les sujets économiques comme le yuan.

"Je pense à la Birmanie où j'ai demandé à la Chine de s'engager vigoureusement (...) Nous avons besoin de la Chine au sujet de l'Iran, du Darfour, de la Corée du Nord. Nous avons besoin de la Chine pour trouver des solutions aux problèmes globaux", a-t-il déclaré. "La Chine joue désormais un rôle essentiel sur la scène économique mondiale (...) Par sa seule existence, elle modifie les équilibres mondiaux", a-t-il souligné. "Cela implique des droits mais aussi des responsabilités, c'est-à-dire des devoirs", a-t-il ajouté, citant également "le yuan" au nombre des "grandes questions" sur lesquelles la Chine doit agir.

"ENTRE AMIS, ON A LE DEVOIR D'EN PARLER"

Le président de la République a en effet réaffirmé qu'il souhaitait une réévaluation du yuan. "Un grand pays doit avoir une monnaie forte. Je souhaite les convaincre [les Chinois] que l'harmonie mondiale à laquelle la Chine est particulièrement attachée doit se traduire par un équilibre juste entre les grandes monnaies, qu'il s'agisse du dollar, de l'euro, du yen ou du yuan, a-t-il déclaré. La Chine a un rôle à jouer en concertation avec les autres acteurs pour ne pas laisser s'accumuler les déséquilibres jusqu'au point où nous ne saurons plus en sortir." La Chine est accusée de maintenir sa monnaie à un niveau artificiellement bas pour soutenir ses exportations et sa très vigoureuse croissance économique, ce qui lui procure un avantage compétitif supplémentaire par rapport aux Européens déjà pénalisés par la hausse de l'euro.

"Entre amis, entre partenaires, on a le devoir d'en parler", a ajouté M. Sarkozy, à propos d'un sujet qu'il devrait évoquer avec les dirigeants chinois lundi. Autre sujet qu'il devrait aborder lundi : celui de l'environnement. Dimanche, il a souligné que "la croissance chinoise ne doit pas et ne peut pas se faire au prix d'une dégradation de l'environnement mondial, de l'épuisement des ressources naturelles, d'un réchauffement accéléré de la planète".

 

La France a signé une série de contrats avec la Chine pour près de 20 milliards d'euros

La France a signé une série de contrats avec la Chine pour près de 20 milliards d'euros
LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 26.11.07 | 05h40 • Mis à jour le 26.11.07 | 08h04

La Chine et la France ont signé, lundi 26 novembre à Pékin, pour environ 20 milliards d'euros de contrats commerciaux.

Le plus important concerne la vente de 160 appareils par Airbus, principalement de la famille A320, pour près de 12 milliards d'euros. Pékin a parallèlement accepté de prendre une participation de 5 % dans le développement de l'A350. Le projet, qui représente un investissement de 10 milliards de dollars, vise à concurrencer le Boeing 787 Dreamliner.

Dans le nucléaire, Areva a vendu à la Chine deux réacteurs EPR, ainsi que du combustible nécessaire à leur fonctionnement, pour un montant total de 8 milliards d'euros. "Nous allons signer tout à l'heure un contrat de huit milliards d'euros, part française, qui comporte la fourniture de deux lots nucléaires EPR de troisième génération (et) l'ensemble du combustible leur permettant de fonctionner jusqu'en 2026", a indiqué Anne Lauvergeon, PDG du groupe français. Elle a précisé que ce contrat serait libellé en euros et non en dollars.

Le groupe français d'électricité EDF va prendre environ 30 % du capital d'une co-entreprise, avec son partenaire chinois CGNPC, qui exploitera des centrales nucléaires en Chine.

La France et la Chine ont également convenu d'étudier la possibilité d'une coopération dans le domaine du recyclage nucléaire, avec la création d'une usine évaluée à 15 milliards d'euros, a affirmé le président français Nicolas Sarkozy.

D'autres contrats ont été conclus concernant notamment le géant français de transport de conteneurs CMA-CGM, l'équipementier en télécoms Alcatel-Lucent (extension de réseaux GSM en province) et le laboratoire Sanofi-Aventis (construction d'une nouvelle usine de vaccins anti-grippaux).



Les principaux contrats signés en Chine

* Areva : vente de deux réacteurs EPR de 3e génération, plus la fourniture de combustible (8 milliards d'euros).
* Airbus : 110 Airbus A320, cinquante A330, pour quelque 12 milliards d'euros.
* Alcatel : équipements de télécommunication pour China Mobile (750 millions d'euros).
* Alstom : signalétique du métro de Shanghai (43 millions d'euros).
* Eurocopter : dix hélicoptères EC155 (80 millions d'euros).
* Natixis : coopération en matière d'efficacité énergétique pour limiter les émission de CO2 (19 millions d'euros).

"L'ensemble fait à peu près 20 milliards d'euros", en comptant "1,2 milliard d'euros d'investissements pour CMA-CGM (l'armateur investit sur le port de Haicang à Xiamen), de Sanofi (une usine de vaccins anti-grippe) et Uramin". (CGNPC prend 35% de la production de trois mines en Afrique, acquises par Areva lors de la prise de contrôle du producteur canadien Uramin).

Il y a également "une quinzaine de milliards d'euros de contrats potentiels en développement pour un projet d'usine de recyclage d'Areva, qui consiste à essayer de valoriser l'uranium et de limiter les déchets nucléaires sur le modèle de ce que l'on fait à La Hague". Selon M. Martinon, "c'est une décision d'engager des recherches communes". "Ces contrats devront aboutir, ils sont quasiment sûrs, à l'horizon de deux ou trois ans", a précisé l'Elysée.
(- avec AFP)

 

2007年11月19日月曜日

A Badong, survivre au barrage des Trois-Gorges

A Badong, survivre au barrage des Trois-Gorges
LE MONDE | 17.11.07 | 14h35 • Mis à jour le 17.11.07 | 14h35
Badong, envoyé spécial


REUTERS/STRINGER SHANGHAI
Barrage des Trois-Gorges le 26 juillet.

Ce qui reste de l'ancien Badong finit là, devant le fleuve où se croisent, dans un concert de cornes de brume, barges chargées à bloc et bateaux de croisière. Dans la nuit qui s'avance, le quartier est quasi désert, et ses derniers habitants glissent comme des ombres sur l'escalier qui menait autrefois à un centre-ville aujourd'hui englouti par la montée des eaux du Yangzi (fleuve Bleu). La vieille épicière assise dans l'obscurité devant sa méchante échoppe est l'une des ultimes rescapées de l'inexorable et prochaine élévation du niveau du fleuve, quand le barrage des Trois-Gorges sera achevé : "Bien sûr, il nous faudra bien partir, sourit-elle, mais on ne sait pas quand. On attend d'avoir l'assurance d'être relogés avant de vider les lieux."

Depuis 2003, quand a débuté le remplissage du réservoir formé par la gigantesque retenue d'eau de 185 m de haut sur le fleuve Bleu, plus d'un million trois cent mille personnes ont été contraintes de quitter leurs foyers. Et 116 villages ont disparu, sombrant parfois avec des chefs-d'oeuvre de l'histoire plurimillénaire de l'empire du Milieu. Le niveau du fleuve est aujourd'hui plus élevé de 90 m par rapport à son étiage précédent. Il montera d'une vingtaine de mètres supplémentaires à l'automne 2008, au moment de la mise en service définitive du barrage.

Durant des années, le gouvernement a vanté les bienfaits d'un ouvrage destiné à alimenter le centre du pays en électricité, à contrôler les crues dévastatrices du fleuve qui ont coûté la vie à 300 000 personnes au XXe siècle et à assurer une navigation plus aisée.

EROSION DES SOLS

Le discours a évolué depuis : Pékin a fini par admettre que la grandeur du projet avait son revers. Au mois d'octobre, le responsable des Trois-Gorges auprès du Conseil d'Etat, Wang Xiaofeng, a dressé la liste alarmante des conséquences du barrage sur l'environnement : érosion rapide des berges, raréfaction et pollution des eaux d'un réservoir de 39 milliards de mètres cubes qui risque de devenir un égout à ciel ouvert, réduction des terres arables, etc. "On ne peut pas sacrifier notre environnement contre de prospérité à court terme", a prévenu M. Wang.

Badong, chef-lieu d'un district de 500 000 âmes, est l'exemple extrême des difficultés à venir : après l'évacuation quasi complète de l'ancienne ville, la plupart des habitants ont été relogés dans une ville nouvelle, plus en hauteur. Mais l'érosion des sols menace aujourd'hui de provoquer des glissements de terrain. Alors, pour conjurer la menace, les autorités de Badong songeraient à prendre une douloureuse décision : déplacer la nouvelle ville plus haut sur les flancs de la montagne... Les habitants devraient être relogés dans la toute nouvelle Badong, une "troisième ville", un quartier plus moderne qui a commencé d'être érigé il y a une dizaine d'années et aligne, sur sa grand-rue, hôtels, restaurants et boutiques de mode qui ont pour nom Chic parisien (en français) ou Marvellous.

"VRAIMENT DANGEREUX ?"

Dans la "seconde ville", certains admettent être au courant de la rumeur d'un plan de déménagement, mais sans savoir au juste ce que l'avenir leur réserve. La jeune patronne d'un restaurant spécialisé dans les soupes de nouilles dit qu'"on avait parlé d'une évacuation en 2008 mais, en fait, on ne sait rien de plus". Elle ajoute, fronçant le sourcil, soudain inquiète : "Vous pensez que ces glissements de terrain sont vraiment dangereux ?" Difficile de répondre : contactés au téléphone, les responsables locaux ont refusé de répondre à nos questions.

Accoudés à un muret dominant le fleuve un peu en hauteur de ce qui reste de la vieille ville, monsieur Wu et son épouse discutent avec animation. M. Wu n'a rien, en soi, contre le barrage des Trois-Gorges. Mais ce qui le met en colère, et il ponctue ses dires de grandes claques du plat de la main sur sa paume droite, c'est que "le deuxième déplacement ne va profiter qu'aux riches qui ont les moyens de se payer de nouveaux appartements" dans la toute nouvelle ville. Sans compter, ajoute-t-il en répétant la vieille antienne des "déplacés des Trois-Gorges", que "les fonctionnaires du district s'en sont mis plein les poches".
ADVERSAIRES D'UNE DES PLUS "GRANDES ÉTAPES DE L'HISTOIRE DE L'HUMANITÉ"

Il fait le geste de remplir les siennes en y enfouissant les mains. "Le gouvernement local a reçu 200 millions de yuans 20 millions d'euros pour lutter contre les glissements de terrain", soutient-il. "Mais on ne sait pas comment cet argent a été dépensé. Même chose pour les sommes attribuées aux relogés pour la construction de nouvelles maisons", conclut-il avec une grimace de dégoût.

Sur le plan écologique, Pékin aurait pu écouter plus tôt l'avis de ses experts : une quinzaine d'années avant le début de la construction du projet des Trois-Gorges, en 1994, un rapport officiel avait avancé que "les aspects négatifs de la réalisation outrepassaient les aspects positifs". A la fin des années 1980, le projet fut suspendu. Mais après le tour de vis politique général consécutif à la répression du mouvement de Tiananmen, le premier ministre de l'époque, Li Peng, le remit sur les rails. Soumis peu après au vote des députés de l'Assemblée nationale populaire, le Parlement chinois, l'adoption du projet ne fit, pour une fois, pas l'unanimité : près d'un tiers des législateurs vota "non" ou s'abstint. Et le gouvernement donne aujourd'hui en partie raison aux sceptiques et aux adversaires d'une des plus "grandes étapes de l'histoire de l'humanité", ainsi que l'avait claironné l'ancien président Jiang Zemin.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 18.11.07.

 

2007年11月10日土曜日

A Macao, le procès pour corruption d'un ex-ministre illustre les dérives d'une économie dopée par les casinos

A Macao, le procès pour corruption d'un ex-ministre illustre les dérives d'une économie dopée par les casinos
LE MONDE | 08.11.07 | 15h16 • Mis à jour le 08.11.07 | 15h16
HONGKONG CORRESPONDANCE

Il a fallu cinq longues heures au juge chargé du dossier pour lire la liste des 76 chefs d'accusation portés contre Ao Man-long, l'ancien ministre des transports et travaux publics de Macao, ex-colonie portugaise rétrocédée à la République populaire de Chine en 1999. Ce procès, qui va durer plus d'un mois, s'est ouvert sous haute surveillance, lundi 5 novembre, à la cour de première instance de Macao. Le dernier procès comparable dans la petite ville de Macao, située à proximité de Hongkong, remonte à 1999 quand "Dent cassée", un célèbre chef de gang, avait été condamné à quinze ans de prison.

Parallèlement aux accusations de corruption, de blanchiment d'argent et d'abus de biens sociaux, liés à des contrats de travaux publics et à des grands chantiers privés, ont été mentionnés des sociétés-écrans, aux Caraïbes et dans les îles anglo-normandes, des placements immobiliers à Macao et à Londres, un diamant de marque offert à une secrétaire et des coffres de banques bourrés de billets d'origine douteuse. Un coffre au nom de la mère, décédée, de l'accusé aurait ainsi contenu l'équivalent en diverses monnaies de 5,6 millions d'euros. Selon le procureur, Ao Man-long aurait exigé une part de 3 % à 10 % sur 41 projets d'infrastructure dont le pont Sai Van, le nouveau stade de Macao et le colossal hôtel de jeux et de villégiature The Venetian qui a, à lui seul, coûté plus de 1,5 milliard d'euros.

Depuis la décision, il y a cinq ans, d'ouvrir le marché des jeux d'argent (établi légalement dans l'ancienne colonie portugaise depuis 1850, et sous monopole jusqu'en 2002), Macao a connu un boom économique sans précédent. Le nombre de casinos a décuplé et Macao a dépassé Las Vegas en volume de jeux. Placé au centre névralgique de tous ces courants financiers pendant sept ans, le ministre des travaux publics aurait donc réussi à détourner près de 100 millions de dollars américains.

Il en aurait largement fait profiter ses parents et sa fratrie. Il aurait mis femme et enfants à l'abri de poursuites judiciaires au Royaume-Uni. C'est d'ailleurs le service des fraudes britanniques qui aurait lancé l'enquête après avoir repéré des transferts suspects.

Arrêté en décembre 2006, le fonctionnaire de 50 ans, réputé pour ses manières impeccables et un grand respect de l'étiquette, encourt vingt-cinq ans de prison. "Ce n'est pas facile pour un fonctionnaire de s'ingérer dans un appel d'offres, a-t-il indiqué pour sa défense : il y a des procédures strictes à suivre". Malgré sa vieille image de cité-tripot et de QG des triades (mafias) de la zone, Macao est aujourd'hui classée quatrième ville la moins corrompue d'Asie.

Florence de Changy
Article paru dans l'édition du 09.11.07.

 

L'épargne chinoise finance l'endettement des consommateurs et de l'Etat américains

L'épargne chinoise finance l'endettement des consommateurs et de l'Etat américains
LE MONDE | 08.11.07 | 15h00 • Mis à jour le 08.11.07 | 15h00

Les pays "pauvres" sont-ils devenus les nouveaux banquiers des pays "riches" ? L'accroissement spectaculaire des réserves de change des pays asiatiques (1 400 milliards de dollars pour la seule Chine à la fin de l'année 2007, soit 955 milliards d'euros), l'accumulation de pétrodollars dans les pays du Golfe et en Russie, les remboursements anticipés des dettes de l'Argentine ou du Brésil font penser que les pays en développement financent désormais les pays industrialisés.

"Sur le plan moral, cette situation est assez choquante", juge Dominique Plihon, professeur d'économie à Paris-XIII et président du conseil scientifique de l'association Attac. La fuite des capitaux vers les pays du Nord briderait, en effet, le développement des économies émergentes qui sont loin de disposer des capitaux nécessaires pour améliorer leurs infrastructures.

Ce paradoxe n'est que partiellement vrai. Les chiffres des investissements directs étrangers publiés par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) l'attestent : les pays industrialisés ont reçu 857 milliards de dollars de capitaux en 2006, mais ils en ont exporté plus encore (1 022 milliards). Pour les pays en développement, la situation est inverse : ils ont reçu plus (379 milliards de dollars) qu'ils n'ont exporté (174 milliards).

"En fait, analyse Boris Cournède, économiste à la division des politiques économiques et monétaires de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le déficit de la balance courante du G7 est surtout un phénomène américain. Aux Etats-Unis, le déficit atteindra 842 milliards de dollars cette année. La nouveauté est qu'il est financé par le surplus commercial de la Chine et par celui des pays pétroliers, alors qu'autrefois, les rééquilibrages se faisaient entre pays développés."

Ce que confirme Patrick Artus, chef économiste chez Natixis, lorsqu'il passe en revue les grandes zones économiques : "L'Amérique latine et l'Union européenne à quinze sont grosso modo à l'équilibre. La première devrait être déficitaire pour financer son développement, mais le traumatisme de la crise de la dette a été si fort que les pays d'Amérique latine préfèrent ne plus avoir de dettes - au risque de ralentir leur croissance - plutôt que de revivre des plans de rigueur et le chômage qui en a résulté."

M. Artus ajoute : "Les pays pétroliers enregistrent un excédent équivalent à 18 % de leur produit intérieur brut ; la Chine, un excédent de 8 % à 9 % ; l'Asie est à + 4 %. L'Inde est en déficit de - 3 % ; l'Europe centrale et orientale, de - 6 % et les Etats-Unis dépassent les - 6 %."

In fine, "nous arrivons à une situation étonnante", qui dure maintenant depuis plusieurs années, commente Xavier Musca, directeur du Trésor. Certains pays émergents, la Chine en tête, investissent massivement dans les bons du Trésor américain. En d'autres termes, la Chine finance une grande partie du déficit colossal de la première économie mondiale.

Pour le reste, elle investit désormais directement ses capitaux excédentaires dans le capital des sociétés occidentales. "D'où la création d'un fonds souverain chinois pour optimiser les placements du pays", indique Yves Zlotoswski, économiste à la Coface. Il a fait notamment parler de lui en prenant près de 10 % de Blackstone, l'un des principaux fonds d'investissement américain.

En 2007, l'excédent commercial de la République populaire devrait atteindre 220 milliards de dollars, alors que le déficit des Etats-Unis se creusera à 750 milliards.

Le déséquilibre des relations financières entre les deux économies ne manque pas d'inquiéter. "Nous sommes en présence d'une anomalie des épargnes dans ces deux pays", explique M. Artus. "La Chine épargne trop, car ses ménages mettent de côté pour compenser l'absence de protection sociale et ses entreprises, qui ne peuvent obtenir des prêts d'un système bancaire bloqué, aussi", ajoute le chef économiste de Natixis.

En revanche, aux Etats-Unis, les particuliers comme l'Etat fédéral sont habitués à vivre à crédit et n'épargnent pas assez. "Les Américains vivent très largement au-dessus de leurs moyens", insiste M. Plihon. Outre-Atlantique, l'afflux des devises en provenance de Chine ou du Golfe contribue à maintenir les taux d'intérêt à des niveaux très bas, ce qui n'encourage pas l'épargne.

Beaucoup d'économistes soulignent les effets pervers d'une croissance chinoise essentiellement tournée vers l'extérieur. Les pays du G7 estiment que l'économie tourne à plein régime grâce à la sous-évaluation du yuan, par rapport au dollar ou à l'euro.

Cette sous-évaluation "de l'ordre de 20 % à 30 %", calcule M. Plihon, favorise les exportations au détriment des importations. Mais seule une partie de la population récolte les fruits d'une croissance de plus de 11 % l'an. "Il y a les laissés-pour-compte. Entre les villes et les campagnes, les inégalités se creusent", indique M. Plihon.

En outre, cette politique monétaire génère de l'inflation qui est estimée à plus de 6 %. Et alimente des tensions sociales. Dans ce contexte, les ménages chinois investissent massivement dans l'immobilier ou en Bourse et contribuent à former des bulles spéculatives.

D'autre part, la multiplication des investissements chinois en Afrique est critiquée, car les pays industrialisés soupçonnent Pékin de tenter de s'approprier les matières premières du continent grâce à ses montagnes d'excédents.

Cette situation explique le rapport de force que les Etats-Unis cherchent à imposer à la Chine à laquelle ils ne cessent de réclamer une réévaluation du yuan, pensant que la faiblesse de la monnaie chinoise contribue à détruire des emplois chez eux.

Le G7 et le Fonds monétaire international ont joint leurs voix à celle de Washington pour demander au gouvernement chinois de réviser sa politique monétaire, le 19 octobre.

Alain Faujas et Claire Gatinois
Article paru dans l'édition du 09.11.07.

 

2007年10月28日日曜日

Pékin lance une sonde d'exploration lunaire dans un concert de propagande patriotique

Pékin lance une sonde d'exploration lunaire dans un concert de propagande patriotique
LE MONDE | 25.10.07 | 15h51 • Mis à jour le 25.10.07 | 15h51
PÉKIN CORRESPONDANT

REUTERS/STRINGER SHANGHAI
La Chine a lancé avec succès son premier satellite d'exploration lunaire, inaugurant un ambitieux programme visant à envoyer un astronaute sur la Lune vers 2020.


REUTERS/XINHUA
Baptisé Chang'e, du nom d'une déesse de la mythologie chinoise, le satellite d'exploration de la Lune doit être propulsé par un lanceur Longue Marche 3-A, depuis la base de Xichang, dans le Sichuan.

AFP/STR
Le satellite doit prendre des images en trois dimensions de la Lune pour préparer l'installation à terme d'une base, soulignent les spécialistes.


"Voler vers la Lune est le désir le plus cher de la nation", a proclamé l'agence de presse officielle Chine nouvelle, mercredi 24 octobre, après le lancement réussi de la première sonde chinoise d'exploration spatiale. L'engin spatial Chang'e-1 - baptisé d'après le mythe de la fée du même nom qui aurait volé le secret de l'immortalité avant de se réfugier sur la lune - a décollé de la base de lancement de Xichang, au Sichuan, à 6 h 05, propulsé par une fusée Longue marche.

Le lancement de cette sonde, dont l'une des missions est de prendre des photos en trois dimensions du relief lunaire, s'inscrit dans l'ambitieux programme spatial chinois qui a pour objectif l'envoi d'un homme sur la Lune vers 2020. En 2003, l'astronaute Yang Liwei était devenu le premier Chinois envoyé dans l'espace à bord d'une capsule spatiale. Deux autres suivront en 2005. Le succès du début de la mission de Chang'e-1, qui s'est séparé de la fusée une trentaine de minutes après le décollage, a été salué par la presse officielle et par le président Hu Jintao lui-même. Si tout continue de bien se passer, la sonde devrait se placer en orbite lunaire vers le 5 novembre.

"L'exploration de la Lune est le symbole de la force de notre nation", a déclaré le responsable du programme lunaire Ouyang Ziyuan, estimant que ces missions sont "très importantes pour élever le niveau de notre prestige international et (renforcer) l'unité du pays".

"MA TERRE NATALE"

Interrogé par l'agence Chine nouvelle, un autre responsable du programme, Luan Enjie, a reconnu que l'on assistait à une "nouvelle vague d'une course à l'exploration lunaire", après le lancement d'une sonde lunaire par le Japon en septembre et la préparation d'une mission similaire par l'Inde en 2008. Mais M. Luan a ajouté que la Chine se garderait d'entrer en rivalité avec ses concurrents, expliquant que les résultats de la mission d'exploration "seront partagés avec le monde entier".

Les médias officiels ont veillé à ce que l'événement ne soit pas perçu à l'étranger comme étant associé à la montée en puissance militaire de l'empire du Milieu. "La Chine a depuis longtemps affirmé clairement que son programme spatial a des buts pacifiques", écrivait mercredi le quotidien anglophone China Daily, qui ne cachait cependant pas son enthousiasme à la pensée que "cette mission ambitieuse est le résultat d'une technologie chinoise à 100 % et démontre l'avancement du pays dans les domaines de la science et de la technologie".

Le programme va durer un an et son coût est estimé à 129 millions d'euros. Quand Chang'e-1 commencera à tourner autour de la Lune, il émettra une trentaine de chansons populaires dont deux ritournelles : Qui ne dit pas du bien de ma terre natale ? et J'aime ma Chine.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 26.10.07.

 

La croissance chinoise reste soutenue

La croissance chinoise reste soutenue
LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 25.10.07 | 09h00 • Mis à jour le 25.10.07 | 10h43


AFP/STR
"L'industrialisation, l'urbanisation et la puissance globale du secteur manufacturier sont les trois moteurs qui continuent de pousser cette croissance très élevée", a dit Chen Xingdong, chef économiste chez BNP Paribas Peregrine à Pékin.


La croissance de l'économie chinoise est restée forte, s'élevant à 11,5 % sur un an au cours des neuf premiers mois de l'année, a annoncé, jeudi 25 octobre, le Bureau national des statistiques (BNS). Au deuxième trimestre, le produit intérieur brut avait progressé encore plus vite, situé à + 11,9 %, mais sur l'ensemble du premier semestre, son augmentation s'était également établie à 11,5 %. Le rythme d'ensemble reste toutefois supérieur à celui, déjà fort, de l'année dernière (+ 11,1 %).

Actuellement quatrième puissance économique de la planète, la Chine devrait rapidement détrôner l'Allemagne de la troisième marche du podium. Pour la première fois cette année, la contribution de la Chine à la croissance mondiale excédera celle des Etats-Unis, d'après le Fonds monétaire international. "L'industrialisation, l'urbanisation et la puissance globale du secteur manufacturier sont les trois moteurs qui continuent de pousser cette croissance très élevée", a dit Chen Xingdong, chef économiste chez BNP Paribas Peregrine à Pékin.

LA PRODUCTION INDUSTRIELLE REPARTIE À LA HAUSSE

L'indice des prix à la consommation en Chine, principal indicateur de l'inflation, a bondi en septembre de 6,2 %, soit un chiffre bien supérieur à l'objectif officiellement fixé d'une progression annuelle contenue sous la barre de 3 %. Le BNS a confirmé que l'indice avait progressé de 4,1 % au cours des trois premiers trimestres. Reflet de la hausse des dépenses de consommation, les ventes de détail ont progressé de 15,9 % en glissement annuel entre janvier et septembre, et de 17 % pour le seul mois de septembre, a-t-il aussi confirmé. "L'inflation est plus basse qu'en août, mais les statistiques sur un mois ne signifient pas un retournement de la tendance. Les données sur l'économie réelle suggéreraient même le contraire", modère Chris Leung, économiste chez DBS à Hongkong.

La production industrielle a bondi de 18,5 % sur un an au cours des neuf premiers mois de l'année, et de 18,9 % sur le seul mois de septembre, selon les chiffres annoncés jeudi. Elle est donc repartie à la hausse en septembre après avoir semblé ralentir pour s'établir à 17,5 % en août. En 2006, la hausse avait été limitée à 12,5 %. Ce secteur est porté par les exportations, en perpétuelle augmentation. Celles-ci ont ainsi encore augmenté de 27,1% sur les trois premiers trimestres de l'année, selon des chiffres récemment publiés. En neuf mois, la Chine a déjà enregistré un excédent commercial de 185,65 milliards de dollars, qui dépasse le record établi en 2006, de 177,47 milliards sur l'ensemble de l'année.

Les échanges commerciaux et les investissements restent deux piliers de la croissance chinoise. Les investissements en capital fixe ont encore enregistré une hausse de 25,7 % sur un an entre janvier et septembre, à peine inférieurs à leur niveau du premier semestre (25,9 %).

 

2007年10月24日水曜日

Hu Jintao réélu pour cinq ans à la tête du Parti communiste chinois

Hu Jintao réélu pour cinq ans à la tête du Parti communiste chinois
LE MONDE | 22.10.07 | 15h10 • Mis à jour le 22.10.07 | 15h11
PÉKIN CORRESPONDANT


REUTERS/DAVID GRAY
Forte de 9 membres, la nouvelle direction restreinte du Parti communiste chinois a été présentée lundi 22 octobre.


Le chef du Parti communiste chinois, Hu Jintao, est parvenu à renforcer son emprise sur l'appareil durant le 17e congrès du PCC, qui s'est achevé dimanche 21 octobre, mais la distribution des rôles au sein du cénacle recomposé de l'instance suprême du pouvoir - le comité permanent du bureau politique -, annoncée lundi matin, semble démontrer que le numéro un n'a pas été pleinement en mesure d'y imposer ses choix.

M. Hu qui, à 64 ans, est également président de la République, a été réélu par ses pairs à la tête du parti pour un nouveau mandat de cinq ans. Il dispose de plus d'alliés que jamais au sein du comité central, composé de 204 membres à plein temps. Ces cinq premières années, le numéro un chinois les a passées à se démarquer de son prédécesseur, Jiang Zemin, forgeant peu à peu son slogan de l'"harmonie sociale" qui consiste à vouloir rééquilibrer, au profit de l'individu, les excès de la croissance d'une Chine emportée dans le tourbillon de sa réussite économique. Ce second quinquennat est, en théorie, destiné à lui permettre de mettre en oeuvre cette philosophie qui a été inscrite dans la Constitution aux côtés des "pensées" de ses aînés, marquant l'empreinte de M. Hu dans l'histoire du PCC.

Mais le numéro un doit désormais diriger dans un contexte où compromis et négociations sont la règle avec les représentants des clans en concurrence. La nouvelle composition du comité permanent du bureau politique, où tout se décide, tendrait à le prouver.

D'abord, M. Hu n'est pas parvenu à réduire cette instance de 9 à 7 personnes, pour limiter la concurrence. Ensuite, à part le premier ministre Wen Jiabao, son allié, M. Hu n'a réussi à imposer, comme nouveau membre, qu'un seul de ses proches, celui qu'il a choisi comme dauphin : Li Keqiang, 52 ans, chef du parti dans la province septentrionale du Liaoning. Et Xi Jinping, secrétaire du parti de Shanghaï, 54 ans, fait une entrée remarquée au sein du même comité. La percée de ces deux poids lourds de la "cinquième génération" est spectaculaire - ils n'étaient même pas membres du bureau politique -, mais celle de M. Xi l'est encore plus : il n'est en poste à Shanghaï que depuis le mois de mars. Et l'on dit qu'il est soutenu par le clan de l'ex-président Jiang Zemin, le vieux rival de Hu Jintao. Selon l'expression chinoise, il y a désormais "deux tigres dans la même montagne". Les deux benjamins du comité pourraient être concurrents pour remplacer M. Hu dans cinq ans.

Quand le secrétaire général a présenté, lundi, ses collègues, deux nouvelles têtes ont attiré l'attention des observateurs : Zhou Yongkang, chef des appareils sécuritaires, et He Guoqiang, responsable de l'organisation du parti, ont été promus pour s'occuper, respectivement, des questions de sécurité et de lutte anticorruption. A noter le départ du vice-président Zheng Qinghong, et celui de la "dame de fer" Wu Yi, vice-premier ministre, qui n'était pas au comité permanent.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 23.10.07.

 

Rencontres très bien "organisées" avec des délégués du 17e congrès du PCC

Rencontres très bien "organisées" avec des délégués du 17e congrès du PCC
LE MONDE | 22.10.07 | 15h11 • Mis à jour le 22.10.07 | 15h11
PÉKIN CORRESPONDANT

C'était une innovation prometteuse : les journalistes étrangers avaient, cette année, la possibilité de demander des entretiens à certains des 2 217 délégués du 17e congrès du Parti communiste chinois, ces membres du PCC choisis pour désigner le comité central. Il suffisait d'en faire la demande sur le site d'information du congrès.

Wang Nan, la plus célèbre joueuse de ping-pong chinoise, une chanteuse d'opéra et un éleveur de pandas ont été sollicités. Le spécialiste des plantigrades n'a pas donné suite, contrairement à la pongiste et à la chanteuse.

Dans un premier temps, on prévient par téléphone que la championne de tennis de table est prête à nous recevoir au centre des médias du congrès. Mais une surprise nous attend à l'arrivée : la jeune Wang Nan est bien là, mais l'entretien personnel est en fait une conférence de presse à laquelle assiste une cinquantaine de journalistes, chinois et étrangers.

La jeune femme profite de l'occasion pour remercier le PCC pour l'avoir "habillée et nourrie toute sa vie". Son premier désir, dit-elle, avait été "d'adhérer à la Ligue des jeunes communistes". Quelqu'un lui demande ce que représente, pour elle, la prochaine tenue des Jeux olympiques à Pékin. "Oh ! ce sera une occasion pour la Chine de prouver qu'elle est la plus forte !"

Deuxième entretien, quelques jours plus tard, avec Chen Suzheng, chanteuse d'opéra traditionnel de l'île de Haïnan, au sud de la Chine. Cette fois-ci, il s'agit d'une "vraie" rencontre : la quarantaine bien mise, brushing un peu soufflé, Mme Chen arrive cependant flanquée d'une fonctionnaire du centre des médias et de deux hommes, dont l'un sort un carnet de notes et un stylo. Elle dit avoir été choisie comme déléguée, pour la première fois, parce que l'"opéra est très populaire sur l'île de Haïnan". Et elle en est très flattée parce que "cela fait vingt ans" qu'elle est au PCC.

Mais Mme Chen ouvre de grands yeux dès que l'on aborde un terrain plus politique, celui des rapports de force au sein du parti et de la sourde lutte de clans concurrents. "Vous ne m'aviez pas soumis ces questions", lâche-t-elle, crispée, devant le preneur de notes qui gratte furieusement sur son carnet.

"Mais que pensez-vous de la nouvelle génération des gens du parti ?" "Non, je ne répondrai pas !" Après un au revoir poli, la chanteuse d'opéra quitte rapidement la salle avec toute sa troupe... de surveillants.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 23.10.07.

 

Le vice-président chinois exclu du nouveau Comité central

Le vice-président chinois exclu du nouveau Comité central
LEMONDE.FR avec Reuters | 21.10.07 | 08h27 • Mis à jour le 21.10.07 | 08h36

REUTERS/JASON LEE
Le vice-président chinois Zeng Qinghong, durant la cession de clôture du 17e Congrès du Parti communiste chinois, qui a entériné son départ, le 21 octobre à Pékin.


Le Parti communiste chinois, qui a bouclé, dimanche 21 octobre, son 17e Congrès, a annoncé que le vice-président Zeng Qinghong ne figurait pas parmi les quelque 200 membres du nouveau Comité central.

Agé de 68 ans, Zeng occupait la cinquième place dans la hiérarchie du Parti et il a été longtemps associé à Jiang Zemin, prédécesseur du président Hu Jintao.

Le départ de Zeng et de deux autres dirigeants du Comité central devrait permettre à Hu d'annoncer, après le Congrès, la promotion de successeurs potentiels.

Wu Guangzheng, 69 ans, responsable de la lutte anticorruption, et Luo Gan, 72 ans, chef de la sécurité, ne font pas non plus partie du nouveau Comité, rapporte le service en anglais de l'agence Chine nouvelle. Mais Jia Qinglin, 67 ans, allié de longue date de Jiang, y demeure.

Parmi les autres personnalités absentes du nouveau Comité central de quelque 200 membres figurent Wu Yi, 68 ans, vice-premier ministre, surnommée la "Dame de fer" pour sa fermeté dans les discussions commerciales avec les Etats-Unis ; le ministre de la défense, Cao Gangchuan, 71 ans, et le vice-premier ministre Zeng Peiyan, 68 ans, chargé de la politique industrielle.

Les personnalités ne figurant pas dans le nouveau Comité central devraient renoncer dans les prochains mois à leurs responsabilités gouvernementales.

Le nouveau Comité central va nommer un bureau politique de quelques dizaines de membres et un comité permanent qui pourrait compter neuf membres dont l'identité sera dévoilée lundi.

SUCCESSION

"Hu a le pouvoir, il lui appartient maintenant de décider comment il veut l'utiliser et ce qu'il veut faire", conclut Li Datong, ancien rédacteur en chef d'un organe du parti, qui publie maintenant des analyses politiques."Mais Hu ne sera pas aventureux. Ce n'est pas dans sa nature".

Hu a promis une "société harmonieuse" débarrassée des conflits et une "perspective scientifique de développement" destinée à apporter davantage de prospérité dans les villages reculés et aux travailleurs pauvres et à lutter contre la pollution.

Jiang Zemin, prédécesseur de Hu, a mis treize ans avant de pouvoir marquer le parti de son empreinte, peu avant sa retraite, en 2002. Le fait que Hu soit en mesure de faire de même alors qu'il a encore devant lui plusieurs années à rester en fonction témoigne de son influence croissante, notent des analystes.

Du nouveau Comité permanent devront émerger, dans cinq ans, les successeurs de Hu et de ses collègues. Li Keqiang, dirigeant du Parti dans la province industriel de Liaoning, dans le nord-est du pays, pourrait être l'un d'entre eux. Il a travaillé avec Hu à la Ligue de la jeunesse communiste. Le nouveau comité permanent pourrait aussi accueillir le chef du parti à Shanghai, Xi Jinping, et d'autres personnalités plus jeunes qui n'entretiennent pas nécessairement des relations de longue date avec Hu.

 

2007年10月20日土曜日

Le G7 admoneste Pékin et veut rassurer les marchés

Le G7 admoneste Pékin et veut rassurer les marchés
LEMONDE.FR | 20.10.07 | 11h48 • Mis à jour le 20.10.07 | 12h12

Les ministres des finances du G7 – les sept pays les plus industrialisés (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni) –, réunis à Washington, ont fait passer deux messages très différents, vendredi 19 octobre. Le premier se voulait rassurant sur "une croissance mondiale qui reste forte", en dépit des "turbulences sur les marchés financiers, des prix élevés du pétrole et la faiblesse du marché immobilier américain".

Le second a consisté à hausser le ton face à la Chine et sa politique de monnaie faible. Le G7 se félicite bien "de la décision de la Chine d'accroître la flexibilité de sa monnaie", mais "au vu du gonflement de l'excédent de sa balance des paiements, nous la pressons de permettre une appréciation accélérée de son taux de change réel".

En termes diplomatiques, cette phrase signifie que les Européens joignent leurs protestations à celle des Américains. Ceux-ci ne se satisfont plus du tout des 5 % de réévaluation annuelle du yuan par rapport au dollar ; ceux-là se désespèrent que l'évolution de la monnaie chinoise par rapport à l'euro soit voisine de zéro.

L'expression de cette exaspération est destinée à conforter le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, et le commissaire européen au commerce Joaquin Almunia, qui se rendront en Chine dans quelques jours.

Sans attendre cette admonestation, Wu Xiaoling, la numéro deux de la banque centrale chinoise, avait certifié, le même jour, que son pays faisait de son mieux, mais qu'il modifierait son taux de change "de manière contrôlée, de sa propre initiative et de façon graduelle".

Le deuxième message est surtout destiné aux marchés. Ceux-ci s'inquiètent des conséquences de la crise des crédits immobiliers américains, de l'envolée des cours du pétrole et du risque de récession aux Etats-Unis.

Henry Paulson, le secrétaire américain au Trésor, et Ben Bernanke, le patron de la Réserve fédérale (Fed), se sont montrés sereins, expliquant en substance : "Certes, la crise immobilière laisse planer une incertitude sur la croissance américaine, mais la demande se maintient et le marché de l'emploi est bien orienté. Laissons les traumatismes se cicatriser en douceur." Le G7 a fait sien cet optimisme. Comme l'a dit, la ministre de l'économie et des finances françaises, Christine Lagarde : "J'espère que les marchés vont entendre." En revanche, le G7 est resté muet sur la faiblesse du dollar et du yen qui inquiètent les Européens presque autant que celle du yuan. M.Paulson a encore une fois affirmé "qu'un dollar fort est bon pour l'économie américaine", ce qui pourrait presque passer pour de l'humour au moment où le billet vert recule chaque jour avec l'assentiment des experts du Fonds monétaire international (FMI).

Le G7 s'est aussi penché sur les dysfonctionnements de la mondialisation constatés ces derniers mois. Il a examiné les nouveaux produits – pas toujours maîtrisés – de la finance, tels la "titrisation" des prêts hypothécaires, les fonds spéculatifs (hedge funds), les fonds vautours et les fonds souverains.

Le G7 fait pression sur les différents acteurs pour obtenir une transparence accrue et des codes de bonne conduite. Ces améliorations permettront peut-être d'éviter des crises ou des scandales, comme celui de la dette de la Zambie à l'égard de la Roumanie rachetée à vil prix par un fonds vautour qui a obtenu d'un tribunal son remboursement intégral, soit 400% de profit au détriment d'un pays très pauvre.

Face à ces ratés, les pays en développement regroupés au sein du G24 se sont payé le luxe de faire la leçon au G7. Il y a quelques années, ils étaient mal en point; aujourd'hui, c'est leur bonne santé qui permet au monde de conserver une croissance de 5 % l'an. Hier, ils quémandaient des prêts auprès du FMI pour surmonter des crises dont ils étaient responsables; désormais, ils sont les créanciers des pays riches.

Au nom du G24, Oscar Tangelson, vice-ministre de l'économie argentin, a sauté sur l'occasion en demandant au FMI "d'améliorer la surveillance qu'il exerce sur les économies avancées, en accordant autant d'attention à l'évaluation des faiblesses de ces dernières qu'à celles des économies émergentes".

Washington, envoyé spécial, Alain Faujas

 

A Pékin, les opposants sont harcelés, brutalisés, enlevés

A Pékin, les opposants sont harcelés, brutalisés, enlevés
LE MONDE | 19.10.07 | 14h38 • Mis à jour le 19.10.07 | 14h38
PÉKIN CORRESPONDANT


AP/Greg Baker
Un policier film une altercation avec une femme près de la place Tiananmen, à Pékin, le 19 octobre 2007.


La tenue du 17e congrès du Parti communiste chinois (PCC), à l'ouverture duquel le chef du parti et président de la République, Hu Jintao, a prononcé, le 15 octobre, un discours où il a mentionné
soixante fois le mot "démocratie", provoque un excès de zèle de la police : ceux, dissidents et défenseurs des droits de l'homme, qui pourraient profiter de l'occasion pour gâcher la grand-messe quinquennale du PCC sont écartés, placés en résidence surveillée, parfois brutalisés.

Zhou Li, une femme de 39 ans, enceinte de plusieurs mois, est une activiste du quartier situé près du célèbre temple du Ciel, une zone où les promoteurs, en cheville avec les autorités municipales, vont faire expulser des milliers de personnes, raser des dizaines de rues pour transformer ce coin populaire du Vieux Pékin en de vastes galeries commerciales. Depuis des mois, elle s'emploie à convaincre les gens de ne pas céder aux compensations financières inadéquates, et appelle à la résistance.

Avant même le début du congrès, elle et ses voisins de la petite cour carrée traditionnelle où elle loge ont commencé à subir le harcèlement des policiers. Deux autres activistes très connus habitent dans la même maison : Sun Xiaodi, un militant écologiste qui a dénoncé la production d'uranium dans la province du Gansu, et Hua Huiqi, chrétien "clandestin" qui appartient à une secte protestante interdite.

RÉSISTANTS DU TEMPLE DU CIEL

Il y a une semaine, ce dernier a été violemment battu devant chez lui par des voyous à la solde de la police. Mercredi, lors de notre rencontre avec Zhou Li, il venait encore d'être brutalisé pour avoir osé, raconte-t-elle, "aller aux toilettes publiques dans la rue". "Les policiers ne laissent plus sortir personne de la maison. Ils ont fini par m'accompagner à l'hôpital pour que je puisse subir des examens, puisque je suis enceinte", dit-elle.

Dans la cour, ce mercredi 18 octobre, c'est l'émotion : la propriétaire, une dame aux cheveux blancs, agenouillée, se prosterne en se tapant le front sur le sol. Elle hurle, désignant deux jeunes hommes : "Ce sont eux qui nous frappent, ce sont eux qui répriment les petites gens comme nous." Trois policiers en civils sont là, vêtus de noir, le visage fermé.

Quelques instants plus tard, une demi-douzaine d'agents, en uniforme cette fois, dont plusieurs officiers et un fonctionnaire s'exprimant dans un anglais correct, font irruption dans la cour, demandent leurs papiers aux deux journalistes présents. Qui seront empêchés de faire leur travail d'enquête alors que Hua Huiqi gît, à moitié inconscient, dans l'une des pièces de la petite cour. On est prié, courtoisement mais fermement, de déguerpir et la police entoure le quartier d'un ruban de plastique jaune qui délimite d'ordinaire une scène de crime. Le piège s'est refermé sur les résistants du temple du Ciel.

Avant l'incident, dans un fast-food situé près de la place Tiananmen, Zhou Li confiait son désabusement : "Je n'ai pas confiance dans le Parti communiste, et Hu Jintao peut bien faire de belles promesses, il est impuissant à changer les choses..."

Depuis plusieurs semaines, la répression contre les défenseurs des droits de l'homme s'est accrue, mobilisant, selon le militant Hu Jia, lui-même en résidence surveillée, "des forces plus importantes qu'à l'ordinaire". Il raconte qu'une quinzaine de policiers campent jour et nuit dans le couloir de son immeuble. L'avocat Gao Zhisheng, connu notamment pour sa défense des membres de la secte interdite du Falun Gong, a disparu depuis des semaines. Un de ses collègues, Li Heping, a été enlevé et passé à tabac par des hommes de main.

Dans la province centrale du Hubei, par ailleurs, deux activistes très connus, Yao Lifa et Lu Banglie, ont "disparu" peu avant l'ouverture du congrès du PCC.
Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 20.10.07.

 

2007年10月18日木曜日

Pékin s'indigne de la visite du dalaï-lama aux Etats-Unis

Pékin s'indigne de la visite du dalaï-lama aux Etats-Unis
LEMONDE.FR avec AFP | 16.10.07 | 11h50 • Mis à jour le 16.10.07 | 12h20


AFP/GIULIO NAPOLITANO
Le dalaï-lama, le 13 octobre 2006.


Pékin a haussé le ton contre les Etats-Unis, mardi 16 octobre, s'insurgeant contre la visite du dalaï-lama à Washington et mettant en garde contre une dégradation des relations entre les deux pays. "Nous avons déjà protesté plusieurs fois auprès des Américains et nous les appelons de nouveau à corriger leur erreur", a déclaré le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Liu Jianchao.

A l'origine du courroux chinois : les cérémonies prévues au Congrès mercredi, où le dalaï-lama se verra remettre la plus haute distinction civile du Parlement, la Médaille d'or du Congrès. Pékin demande aussi à George Bush d'annuler sa rencontre, prévue ce mardi, avec le chef spirituel tibétain.

"GROSSIÈRE INGÉRENCE"

Pour Liu Jianchao, ces honneurs "violent gravement les principes de base des relations internationales, heurtent les sentiments des Chinois et constituent une grossière ingérence dans les affaires intérieures chinoises". "Nous exprimons notre profond mécontentement et notre ferme opposition", a-t-il ajouté, prévenant que "cette action va saper gravement les relations entre la Chine et les Etats-Unis".

C'est la première fois que le président américain participera à un événement public avec un homme qui incarne, à l'étranger, la lutte pour les droits fondamentaux en Chine. Pékin avait déjà exprimé son vif mécontentement quand la chancelière allemande, Angela Merkel, avait reçu, en septembre, le dalaï-lama.

Une réunion internationale sur le programme nucléaire iranien, prévue mercredi à Berlin, a été reportée sine die, en raison, selon des diplomates, du désaccord sino-américain sur le dalaï-lama. Cependant, le porte-parole chinois Liu Jianchao a nié cette version, affirmant que l'annulation était due à des "raisons techniques".

 

Se donner bonne conscience face à la Chine

Se donner bonne conscience face à la Chine
LE MONDE | 17.10.07 | 14h56 • Mis à jour le 17.10.07 | 14h56

On l'aime bien, en Occident, le dalaï-lama. Mais si l'intérêt pour sa philosophie et ses enseignements drainent des foules toujours plus nombreuses de bouddhistes européens ou américains, sur le plan politique, l'ultime réincarnation du Bouddha Cherenzi semblait pourtant sur la touche.

En ces temps où la Chine obsède le monde, que pèse la sympathique image de cet homme de 72 ans qui risque fort de ne jamais revoir son pays, le Tibet, en voie de sinisation avancée ? Même à Dharamsala, sa redoute himalayenne où il préside un "gouvernement en exil" depuis sa fuite, en 1959, les plus radicaux n'hésitent pas à critiquer sa politique.

Les militants du Tibetan Youth Congress, l'organisation des "jeunes" exilés tibétains, estiment que la posture de non-violence prônée par le dalaï-lama s'est avérée impuissante à faire fléchir les hiérarques d'un empire du Milieu qui revendique un long rapport de suzeraineté avec le Tibet.

Le dalaï-lama a toujours soutenu que le passage à la violence sur le toit du monde ne servirait qu'à compliquer la vie de ses anciens sujets. Mais en quarante-huit ans, depuis le soulèvement de Lhassa, militaires et policiers chinois ont réussi à casser le mouvement de guérilla tibétaine des années 1950, puis celui emmené par les moines bouddhistes des années 1980-1990.

La cause tibétaine est sans doute une cause perdue : le dalaï-lama ne cesse de répéter qu'il admet l'appartenance de son ancien royaume à la Chine éternelle ; tout juste se borne-t-il à demander la fin d'un "génocide culturel" au Tibet et la possibilité pour les Tibétains de mener, localement, leurs propres affaires. La réponse de Pékin n'a presque jamais varié, en dépit de négociations secrètes avec des envoyés de "Sa Sainteté" : le dalaï-lama ne serait qu'un "sécessionniste" dangereux pour l'"unité de la patrie" chinoise...

Mais voilà que, depuis quelque temps, tout se passe comme si le "pape" de l'Eglise tibétaine revenait au centre de la scène. En quelques mois, il a été reçu en Australie par le premier ministre John Howard ; puis par le chancelier australien Alfred Gusenbauer ; enfin, par la chancelière allemande Angela Merkel. Mercredi 17 octobre, après s'être entretenu discrètement la veille avec George Bush, il devait apparaître pour la première fois en public avec un président américain en exercice, à l'occasion d'une réception au cours de laquelle il devait recevoir la médaille d'or du Congrès.

Il ne faut, bien sûr, pas exagérer la signification de cette rencontre. Aucun leader mondial n'ira très loin dans son soutien à la cause tibétaine. Sans doute le dalaï-lama est-il une figure commode permettant à l'Occident de se racheter une conscience à bon marché face au dragon chinois.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 18.10.07.

 

Privés de démocratie, les bourgeois branchés de Pékin pensent à l'argent

Privés de démocratie, les bourgeois branchés de Pékin pensent à l'argent
LE MONDE | 16.10.07 | 15h24
PÉKIN CORRESPONDANT

La scène se passe dans un bar à vin du quartier de Houhaï, un ensemble de maisons traditionnelles alignées le long d'un lac devenu l'un des hauts lieux du tourisme à Pékin. Ils sont deux : elle a une petite trentaine et travaille dans l'art contemporain ; lui a le même âge, il est professeur d'arts plastiques. Ils ne veulent pas être nommément cités, car ils expriment des idées qui, pour le moins, ne sont pas vraiment "dans la "ligne"...

Le Parti communiste chinois (PCC) a ouvert, lundi 15 octobre, son 17e congrès. "Le parti ? C'est une fiction, s'esclaffe la jeune femme en commandant un verre de bordeaux. La plupart des Chinois se moquent de la politique. Je ne me sens liée en rien avec l'Etat, je ne paie pas d'impôts..."

La fraude fiscale, un sport national en République populaire de Chine, n'est que l'un des comportements qui illustrent le cynisme d'une partie de l'élite et, plus généralement, des représentants de la classe moyenne et moyenne supérieure.

Le professeur a été éduqué à l'étranger. Il boit des bières en maugréant contre le système : "Moi, le congrès du parti et tout ça, ça ne me concerne absolument pas, car on n'est pas en démocratie. On n'a le choix de rien. Sauf celui de la fermer. "

Changement de décor et rencontre dans "l'usine 798", une friche industrielle partiellement transformée en un vaste réseau de galeries d'art contemporain, de cafés, d'ateliers d'artistes. Un temple de la culture "underground" au début des années 2000, qui a été récupéré par le marché de l'art contemporain, en plein boom en Chine.

Dans un studio de style Bauhaus - l'usine était à l'origine allemande - un "installateur" connu, qui préfère garder l'anonymat, porte un jugement plus mesuré. "Le parti n'est pas tant que ça coupé des gens. Ma soeur y est inscrite, sourit-il. Mais je trouve qu'il a pris trop de pouvoir dans nos vies ; l'essentiel est la démocratie. On est quand même dans une phase, grâce aux réformes économiques lancées par Deng Xiaoping, de développement et d'enrichissement. Il faut reconnaître que le parti est un garant de stabilité. Il a réussi à permettre une élévation du niveau de vie de la population."

Dans un luxueux ensemble résidentiel, une photographe, qui a réussi dans l'art contemporain, éclate de rire quand on lui demande ce qu'elle pense du congrès du PCC. "Je ne lis jamais de journaux et quand on se réunit avec mes amis, on ne parle jamais de politique. Je crois qu'on n'a jamais dû, ensemble, prononcer le nom de Hu Jintao ! (chef du parti et président de la République)", s'exclame-t-elle.

"Durant les événements de Tiananmen, en 1989, je suis sortie dans la rue. J'étais passionnée par ce qui se passait, se souvient la photographe. Puis la tragédie est survenue, la répression. Aujourd'hui, je me dis que tout va trop vite en Chine. Je suis excitée par ce développement rapide mais aussi un peu effrayée : ce pays va-t-il enfanter un monstre ?"

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 17.10.07.

 

La visite du dalaï-lama à Washington provoque la colère de Pékin

La visite du dalaï-lama à Washington provoque la colère de Pékin
LE MONDE | 17.10.07 | 14h56 • Mis à jour le 17.10.07 | 20h03
WASHINGTON, PÉKIN CORRESPONDANTS

AP/Evan Vucci
George Bush et le dalaï-lama lors de la remise de la médaille d'or du Congrès à ce dernier, le 17 octobre à Washington.


Les précautions américaines ont été vaines : la Chine a très vivement réagi à la visite à Washington du dalaï-lama. "Le fait que le président américain (le) rencontre représente une sévère violation des normes de relations internationales", a déclaré, mardi 16 octobre, le ministre des affaires étrangères chinois, Yang Jiechi, avant même la rencontre entre George Bush et le chef de l'Eglise tibétaine. "Nous exprimons notre extrême insatisfaction et notre ferme opposition. Nous pressons les Etats-Unis d'annuler cette visite", a-t-il ajouté en remarquant que la Chine se sentait "blessée" de cette "interférence dans ses affaires intérieures". "Cette rencontre va sérieusement ébranler les relations sino-américaines", a averti de son côté le porte-parole chinois des affaires étrangères, Liu Jianchao.

Pourquoi avoir décidé de dérouler le tapis rouge pour le dalaï-lama au risque de froisser la Chine alors que Pékin a eu une attitude jugée constructive sur le dossier du nucléaire nord-coréen et le Darfour ? Après ces réactions courroucées, l'administration Bush a tenté de relativiser le caractère historique de la visite de cinq jours qu'effectue actuellement le dignitaire tibétain à Washington.

Les détails de cette visite ont été soigneusement étudiés. Le dalaï-lama a été reçu mardi pendant trente minutes par M. Bush, non pas dans le Bureau ovale, comme l'escomptaient ses fidèles, mais dans les appartements du couple présidentiel. Aucune photo n'a été publiée. La porte-parole de la Maison Blanche Dana Perino a minimisé l'événement en indiquant que c'était la quatrième rencontre entre les deux responsables.
REMISE DE MÉDAILLE

Le geste le plus significatif est intervenu mercredi au Capitole. M. Bush a remis la médaille d'or du Congrès, la récompense civile la plus prestigieuse, au chef de l'Eglise tibétaine, lors d'une cérémonie solennelle. Selon sa porte-parole, M. Bush, qui assiste traditionnellement à cette cérémonie, a pris soin d'avertir son homologue chinois, Hu Jintao, lors d'une rencontre début septembre.

Pour les partisans du dalaï-lama, c'est une importante victoire, après des années de lobbying au Congrès. Il a fallu le changement de majorité, et l'insistance de la présidente démocrate Nancy Pelosi, élue de Californie, pour que la cérémonie soit organisée. Selon les analystes, Washington entend faire comprendre à Pékin que "jouer la montre" en faisant semblant de dialoguer à propos du Tibet ne constitue pas une politique.

La coïncidence qui fait que cette rencontre intervient alors que vient de s'ouvrir le 17e congrès du Parti communiste chinois est présentée comme fortuite. L'administration américaine n'a pas en ce moment de motif particulier de mécontentement envers Pékin : la diplomatie chinoise a fini par accepter le principe d'une déclaration présidentielle à l'ONU condamnant la junte de Birmanie pour la répression contre les moines bouddhistes. Le discours de Hu Jintao sur Taïwan, lundi à Pékin, a été jugé modéré.

Pour les experts, l'administration Bush fait le calcul que les Chinois, à moins d'un an des Jeux olympiques de Pékin, n'ont pas de véritables moyens de rétorsion, d'autant que les projets de loi s'accumulent au Congrès pour condamner leurs pratiques commerciales. Le différend sur le Tibet est par ailleurs assumé : il est moins délicat à gérer que celui qui existe sur Taïwan, dans la mesure où les Etats-Unis, comme l'a rappelé Mme Perino, ne sont pas favorables, eux non plus, à l'indépendance du Tibet.

Bruno Philip et Corine Lesnes
Article paru dans l'édition du 18.10.07.

 

La Chine tend la main à Taïwan pour affaiblir les "indépendantistes"

La Chine tend la main à Taïwan pour affaiblir les "indépendantistes"
LE MONDE | 16.10.07 | 15h23 • Mis à jour le 16.10.07 | 15h24
PÉKIN CORRESPONDANT

AFP/FREDERIC J. BROWN
Le président chinois Hu Jintao lors de son discours inaugural à l'ouverture du 17e Congrès du Parti communiste à Pékin, le 15 octobre 2007.


Le chef du Parti communiste chinois (PCC) et président Hu Jintao a fait preuve de modération, lundi 15 octobre, lors de son adresse inaugurale à l'ouverture du 17e congrès du parti. Alors que l'on pouvait s'attendre à un discours musclé à l'égard de Taïwan, dans un contexte des plus tendus entre la République populaire de Chine et la République de Chine (nom officiel de Taïwan), M. Hu a appelé "de manière solennelle, à discuter d'un arrêt formel des hostilités entre les deux rives (du détroit), pour parvenir à un accord de paix".

Le fait que le numéro un chinois ait décidé de ne pas recourir à l'escalade verbale pour dénoncer les projets du président taïwanais Chen Shui-bian, porte-drapeau du clan des "indépendantistes" de l'île, s'explique par la stratégie pékinoise. Le président taïwanais arrive à la fin de son deuxième mandat au printemps 2008. Il ne peut se représenter aux élections, et Pékin compte sur une victoire électorale du candidat de l'opposition. Soit le représentant du Kouomintang, le parti de Tchang Kaï-chek, l'ennemi des communistes qui le forcèrent, en 1949, à se réfugier à Taïwan !

Mais les héritiers du généralissime sont d'accord avec leurs adversaires d'hier pour célébrer le principe d'"une seule Chine" prôné par Pékin, et qui suppose l'unité de la nation chinoise tout en permettant à Taïwan de profiter d'un statu quo l'autorisant à jouir d'une souveraineté politique tolérée par Pékin. M. Chen défend au contraire une affirmation plus poussée de l'identité taïwanaise. Il propose d'organiser un référendum sur l'opportunité de présenter la candidature aux Nations unies de son pays sous le nom de Taïwan. Ce qui serait perçu par Pékin comme une déclaration d'indépendance et, donc, pourrait être un motif d'invasion.

Lundi, Taïwan a aussitôt rejeté la main tendue de M. Hu, ce dernier conditionnant le traité de paix au respect du concept d'"une seule Chine". Mais Washington, inquiet des projets de M. Chen, pourtant président d'une île qui est son alliée, a réagi positivement, estimant que la proposition du chef du PCC était "un pas dans la bonne direction". Ces dernières semaines, Pékin avait plutôt soufflé le froid, annonçant la nomination au poste de chef d'état-major de l'Armée populaire de libération (APL) du général Chen Bingde, qui a occupé à plusieurs reprises des responsabilités de commandement dans la région militaire de Nankin, qui fait face à Taïwan.

Fin septembre, le porte-parole du bureau des affaires taïwanaises auprès du Conseil d'Etat (gouvernement), Li Weiyi, avait prévenu que le 17e congrès serait l'occasion de "redéfinir une nouvelle direction" à propos de Taïwan.

Les propositions de Hu Jintao ne sont pourtant pas nouvelles, Pékin alternant traditionnellement menaces et promesses en la matière. Il a répété que "personne, sous aucune forme que ce soit, et sous quelque nom que ce soit, ne pourra séparer Taïwan de la mère patrie". Avant d'ajouter qu'il était prêt à initier des politiques garantissant les énormes investissements taïwanais en Chine populaire.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 17.10.07.

 

2007年10月3日水曜日

Pékin admet le risque écologique présenté par le barrage des Trois-Gorges

Pékin admet le risque écologique présenté par le barrage des Trois-Gorges
LE MONDE | 02.10.07 | 14h51 • Mis à jour le 02.10.07 | 14h51
PÉKIN CORRESPONDANT


REUTERS/STRINGER SHANGHAI
Barrage des Trois-Gorges le 26 juillet.


Le barrage des Trois-Gorges, la pharaonique réalisation hydroélectrique sur le fleuve Yangzi, pourrait provoquer une catastrophe écologique si rien n'est bientôt fait pour la prévenir : cette affirmation n'émane pas de responsables étrangers d'organisations de défense de l'environnement mais d'experts chinois cités par la presse officielle. Une telle mise en garde indique un net changement d'attitude de l'actuelle direction du Parti communiste, qui prétend aujourd'hui se soucier des conséquences sur l'écologie de la croissance économique effrénée de la République populaire.

Le directeur du projet des Trois-Gorges auprès du Conseil d'Etat (gouvernement), Wang Xiaofeng, a dressé, la semaine dernière, la liste des menaces que fait peser ce projet d'un coût d'une vingtaine de milliards d'euros sur l'écosystème des régions qu'il traverse : érosion des sols, glissements de terrain, raréfaction et pollution de l'eau - cette dernière étant notamment provoquée par la sédimentation -, réduction de la surface des terres arables. A cela s'ajoutent les conflits sociaux provoqués par ces évolutions.

M. Wang, qui a fait ces remarques durant un séminaire consacré à cette question dans la ville de Wuhan, dans la province du Hebei, non loin du barrage, n'a pas mentionné un autre coût, plus directement humain celui-là, et que les autorités ont toujours passé sous silence : le déplacement forcé de 1,4 million de personnes vivant sur les berges du fleuve Bleu ainsi que la disparition sous les eaux de 116 villages et de certains chefs-d'oeuvre millénaires...

Mais le constat de ce responsable a été aussi précis que nouveau par rapport à l'habituel discours lénifiant de la propagande. "Nous ne pouvons pas nous permettre de baisser la garde devant les questions de sécurité écologique et de l'environnement", a-t-il prévenu avant d'ajouter : "Nous ne pouvons sacrifier notre environnement contre des perspectives de prospérité à court terme."

Un jugement qui se fait certes l'écho du discours officiel d'aujourd'hui mais tranche avec celui des prédécesseurs de l'actuelle direction. Alors que les communistes chinois préparent leur 17 e Congrès qui devrait s'ouvrir le 15 octobre, cette déclaration n'est pas innocente : l'ancien président Jiang Zemin, chantre de la croissance à tous crins, avait qualifié le projet en 1997 d'étape "remarquable dans l'histoire de l'humanité" qui permettra de mieux "exploiter les ressources naturelles". Aujourd'hui, le président Hu Jintao, son successeur et adversaire, ne cesse d'exalter "l'harmonie sociale" afin d'humaniser une croissance qui devrait suivre un modèle plus mesuré et mieux adapté de "développement scientifique".

A Chongqing, la gigantesque municipalité située en amont du barrage, l'écologiste Wu Dengming, longtemps harcelé par les autorités pour avoir critiqué le projet, se félicite du discours de Wang Xiaofeng : "Bravo !, politiquement, c'est un pas en avant courageux dans la bonne direction." "Désormais, a ajouté avec une certaine perfidie le président de la Ligue des Verts de Chongqing, je vais pouvoir citer les hauts responsables de Pékin quand je m'entretiendrai avec les autorités locales..."

Cette prise de conscience neuve de la part d'autorités plus soucieuses de prévenir une catastrophe écologique ne résout cependant pas la contradiction dans laquelle risque, pour longtemps, de s'enliser la Chine : un barrage comme celui des Trois-Gorges incarne le phénoménal boom économique du pays, répond à ses énormes besoins en électricité, aide à réguler les cycles d'inondations et de sécheresse dans la région du fleuve Bleu.

Mais Pékin a beau s'efforcer d'anticiper les problèmes liés à une telle prouesse technologique, il n'est pas évident, même pour un régime autoritaire, d'être entendu par les autorités locales, dont la psychologie du développement à tout prix n'a pas, ou peu, évolué.

Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 03.10.07.

 

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