2008年3月1日土曜日

Quand la France invite un dissident chinois, qualifié de "personnalité d'avenir"

Quand la France invite un dissident chinois, qualifié de "personnalité d'avenir"
LE MONDE | 29.02.08 | 16h08 • Mis à jour le 29.02.08 | 16h08

L'événement est suffisamment rare pour ne pas être relevé. Paris accueille actuellement un célèbre dissident chinois, un geste à la portée symbolique non négligeable alors que la diplomatie française avait, jusqu'à présent, témoigné sur le terrain des droits de l'homme, une certaine frilosité à l'égard de Pékin.

Hôte très officiel du Quai d'Orsay, Ren Wanding est une tête d'affiche de la dissidence chinoise. Fondateur, en 1998, du mort-né Parti démocrate chinois (PDC), il est l'un des rares opposants à avoir pris part aux deux épisodes emblématiques de la contestation postmaoïste (le "mur de la démocratie" de l'hiver 1978-1979 et le "printemps" de 1989 sur la place Tiananmen).

Cet engagement lui a valu de passer onze ans - en deux séjours - dans les geôles du régime communiste, ce qui donne aussi, la valeur de son inscription, par le Centre d'analyse et de prévision (CAP) du "Quai", au programme "Personnalités d'avenir". Un cadre dans lequel ont déjà été invitées en France des figures comme l'Iranienne Chirine Ebadi ou le Biélorusse Alexandre Milinkiewicz. Cette étape parisienne s'inscrit dans une pérégrination internationale de Ren Wanding qui, après les Etats-Unis, le conduira dans divers pays européens.

"LIGNE ROUGE"

Le dissident ne semble pas avoir eu de difficulté pour sortir de Chine. Les autorités lui ont délivré un passeport en bonne et due forme. Il est vrai que Ren Wanding avait seulement précisé à ses chaperons officiels qu'il nourrissait le projet de se rendre en Nouvelle-Zélande quand il préparait discrètement une expédition aux Etats-Unis.

Mais la politique chinoise à l'égard des dissidents a bien changé. Non seulement Pékin ne s'offusque pas de voir ses contestataires prendre le chemin de l'Occident, mais il les encourage même à s'éloigner, l'expérience ayant prouvé que l'écho de leur voix dissonante s'assourdissait dans la distance. Ren Wanding est bien plus inoffensif à New York ou à Paris qu'à Pékin, au coeur même du décor olympique, là où ses critiques du régime relayées par des micros étrangers seraient infiniment plus embarrassantes.

De plus, Ren Wanding n'est plus la "bête noire" du Parti communiste chinois (PCC). En ces temps pré-olympiques, la "ligne rouge" à ne pas franchir est très claire : l'appel au boycottage des Jeux. Quiconque le répercute est impitoyablement muselé, tel Hu Jia, récemment inculpé à Pékin pour "incitation à la subversion du pouvoir d'Etat". Or Ren Wanding n'approuve pas le mot d'ordre. Le sien est plus nuancé : "Oui aux Jeux, non au PCC", a-t-il indiqué au Monde.

"J'admets que c'est contradictoire, car les Jeux vont servir le PCC, explique-t-il. Mais le peuple chinois est favorable aux Jeux, il en est fier. Alors, notre rôle consiste à rappeler qu'il ne faut pas oublier que ce système est une dictature."

Cet été olympique ne sera donc qu'un répit, avertit Ren Wanding. Selon lui, le PCC peut marquer des points à court terme, il sera rattrapé à moyen terme par les contradictions libérées par sa réforme économique. "Le régime a l'air très fort, mais c'est une impression superficielle, met-il en garde. Il est miné par la corruption de ses fonctionnaires." D'où l'incurable optimisme du dissident : "Dans dix ans, la Chine sera démocratique", assure-t-il. Et il conclut : "C'est sûr." S'il dit vrai, Ren Wanding est assurément une "personnalité d'avenir" à ménager.

Frédéric Bobin
Article paru dans l'édition du 01.03.08.

 

0 件のコメント:

ブログ アーカイブ