2008年3月17日月曜日

Tibet: "génocide culturel", selon le dalaï lama

Tibet: "génocide culturel", selon le dalaï lama

- Militaires chinois dans les rues de Lhassa, la capitale du Tibet (15-3-2008) - AFP - STR -

Militaires chinois dans les rues de Lhassa, la capitale du Tibet (15-3-2008)

© AFP - STR

Le dalaï lama, leader spirituel des Tibétains, a condamné dimanche de son exil indien un "génocide culturel"

S'exprimant sur les violences qui auraient fait 80 morts à Lhassa (10 morts pour Pékin), selon le gouvernement tibétain en exil, il a dénoncé un "régime de terreur" et demandé une enquête internationale. Mais il refuse d'appeler au boycott des J.O.

Selon des témoins, les violences se poursuivaient dimanche dans la capitale du Tibet.

Les manifestations s'étendent hors du Tibet
Dimanche, dans une province chinoise voisine du Tibet, le Sichuan (sud-ouest), deux cents manifestants tibétains ont lancé des cocktails Molotov et incendié un commissariat de police, un marché et des habitations du comté d'Aba, a rapporté un policier. Ils sont devenus fous", a-t-il déclaré, la voie tremblante, joint par téléphone alors que le principal bâtiment administratif du comté était assiégé par les émeutiers.

Les forces de l'ordre ont tiré des gaz lacrymogènes pour disperser la foule et procédé à des arrestations parmi les manifestants, qui ont aussi brûlé deux véhicules de police et un camion de pompiers. Des policiers ont été blessés par des jets de pierres. Selon le témoignage d'un Tibétain résident à Aba, des bruits très forts semblables à des coups de feu résonnaient et la rumeur circulait que plus de dix personnes avaient été tuées.
"La situation est très tendue. Les policiers sont partout, contrôlent tout et examinent les blessés", a rapporté un autre habitant d'Aba, qui a ajouté que la plupart des manifestants étaient des étudiants du lycée tibétain.

Un monastère pris d'assaut
Une ONG, le Centre tibétain pour les droits de l'homme et la démocratie, fait état sur son site internet de la mort de sept personnes tuées par balles et ajoute que les moines de la lamasserie d'Amdo Ngba Kirti, également dans le comté d'Aba au Sichuan, ont hissé le drapeau tibétain et scandé des slogans en faveur de l'indépendance du Tibet, après les prières du matin.

Les forces chinoises ont donné l'assaut au monastère, où vivent 2.800 lamas. Ils ont tiré des gaz lacrymogènes et empêché les moines de sortir manifester. Le Sichuan, limitrophe du Tibet, est l'une des quatre provinces qui comptent une importante minorité tibétaine.

Par ailleurs, au moins sept Tibétains ont été tués par balles dimanche lors d'une manifestation réprimée par la police à Ngawa, un autre district tibétain de la province du Sichuan (sud-ouest), selon un témoin direct et deux groupes pro-tibétains.

Les déclarations du dalaï lama
"S'il vous plaît, enquêtez, si cela est possible... Qu'un organisme international tente d'abord d'enquêter sur la situation au Tibet", a plaidé le chef spirituel du bouddhisme tibétain, lors d'une conférence de presse à Dharamsala (Inde), où il vit en exil.

"Que ce soit de façon intentionnelle ou non, un génocide culturel est en train de se dérouler", a ajouté le dignitaire, affirmant que les Tibétains étaient traités "comme des citoyens de seconde classe" au sein de la région autonome chinoise. Le dalaï lama a également pourfendu le mode de gouvernement imposé par la Chine. "Ils s'appuient uniquement sur la force de façon à obtenir un simulacre de paix, une paix amenée par la force au moyen d'un régime de la terreur", a considéré le chef spirituel tibétain.

Il s'est toutefois refusé à appeler au boycottage des Jeux olympiques prévus en août à Pékin. "Je souhaite ces jeux", a-t-il dit. "Le peuple chinois (...) a besoin de se sentir fier. La Chine mérite d'accueillir les Jeux olympiques", a-t-il estimé. "On doit rappeler à Pékin qu'il doit être un hôte convenable pour les Jeux olympiques", a-t-il déclaré.

Interrogé sur le bilan des émeutes, le dalaï lama a déclaré: "Nous avons différentes sources: certains disent 10 [morts, NDLR], d'autres 30, d'autres encore 60, et certains 80, 100. Je ne sais pas".

Il a par ailleurs réaffirmé qu'il luttait pour une autonomie du Tibet, et non l'indépendance, Il a rappelé que son action était non violente. A la question de savoir s'il avait la capacité de mettre fin aux manifestations, le chef spirituel des Tibétains a répondu qu'il n'avait "pas un tel pouvoir". "Je me sens impuissant", a-t-il affirmé.

La situation à Lhassa
Dimanche, l'armée chinoise a bouclé Lhassa, capitale de la région autonome du Tibet - qui est interdite aux journalistes étrangers non pourvus d'un sauf-conduit et inaccessible désormais aux touristes - afin d'éviter que se reproduisent des émeutes comme celles de vendredi, les plus graves au Tibet depuis 1989.
De nombreux magasins ont rouvert et les voitures circulaient de nouveau dans les rues de Lhassa, le calme y étant revenu, a affirmé dimanche l'agence de presse officielle Chine nouvelle.

Cette description contraste vivement avec les derniers témoignages. "J'ai entendu des coups de feu étouffés. Il n'y a aucun doute", a déclaré un représentant de l'ONG Volunteer Medics Worldwide, dimanche à son arrivée à Chengdu (ouest de la Chine), Gerald Flint, un ancien marine américain. "Il y a eu des coups de feu. La nuit dernière, spécialement, la situation était mauvaise", a dit Chelsea Cockett, étudiante américaine, arrivée à bord du même vol.


"Il y a des soldats à chaque coin de rue, des militaires en tenue de combat complète. Des tas de camions", a expliqué le représentant de Volunteer Medics Worldwide. Il a décrit la tenue de combat des soldats chinois comprenant "armes automatiques, masques à gaz, casques, boucliers". L'ancien marine a aussi fait état de bruits "d'explosions". Samedi, "on a commencé à entendre davantage d'explosions à partir de l'après-midi jusque dans la nuit".

Fumées au dessus de Lhassa, selon les images de la télévision chinoise reprise par la chaîne France 24 (AFP - France 24 - TV Grab)


De son côté, l'étudiante a expliqué avoir été confinée à l'hôtel à son arrivée à Lhassa. "Il y avait des militaires autour et ils ne nous laissaient pas partir. Il y avait des coups de feu et nous ne savions pas ce qui se passait", a raconté Chelsea Cockett. "Les étrangers étaient plus ou moins sous arrestation à domicile", a souligné Gerald Flint.

Autres témoignages
Un peu plus tôt, d'autres témoins affirmaient que la capitale du Tibet, en proie à des émeutes vendredi, était calme et était toujours quadrillée par les forces de l'ordre chinoises. "L'est de Lhassa est bloquée par la police armée. On n'y pénètre que muni d'un document d'identité, si l'on y vit ou y travaille. Mais dans l'ouest, où se trouve mon restaurant, la situation est meilleure. Nous sommes ouverts, même si nous avons moitié moins de clients que d'habitude", a affirmé le patron d'un restaurant sous couvert de l'anonymat.

"Les choses sont rentrées dans l'ordre, il ne faut pas croire les rumeurs, c'est exagéré. C'est vrai que l'armée est présente mais les gens sont retournés à leurs activités", selon une employée d'un tribunal.

De nombreuses personnes jointes dans les hôtels dimanche affirmaient ne pas avoir repris le cours normal de leur existence. "La direction ne nous permet pas de sortir. Nous sommes dans l'hôtel depuis vendredi. Dehors, il y a la police armée partout", a indiqué une réceptionniste d'hôtel.

"Lhassa est calme. Nous n'avons pas décrété la loi martiale et la situation au Tibet dans l'ensemble est bonne maintenant", a affirmé de son côté le maire de la préfecture de la région autonome du Tibet.

Un bilan des victimes
Le gouvernement tibétain en exil a annoncé dimanche avoir reçu, "pour le moment", la confirmation d'un bilan de "80 morts confirmés", la majorité tibétains, dans les violences. Bilan établi "à partir de coups de téléphone passés depuis le Tibet" par des témoins, notamment des membres "des services de sécurité". "72 personnes ont également été blessées", selon la même source.


Emeutier à Lhassa, selon une image de la télévision officielle chinoise CCTV (AFP - Peter Parks)"Parmi les 80 morts figurent cinq jeunes filles tuées à l'extérieur de Lhassa", a indiqué un proche collaborateur du dalaï lama, leader spirituel des tibétains en exil en Dharamsala (nord de l'Inde).

De leur côté, les autorités de Pékin affirment que 10 personnes ont été tuées, des commerçants chinois pour la plupart.

Menaces chinoises
Les autorités ont juré de maintenir l'ordre et de "réagir fermement" aux auteurs des violences à Lhassa. Elles accusent ces derniers d'être des séparatistes à la solde de "la clique du dalaï lama".

Selon le "Quotidien du Tibet", les responsables locaux ont tenu une réunion de crise samedi, sous la houlette du secrétaire régional du parti communiste, Zhang Qingli. "La réunion a souligné qu'il fallait (...) livrer une guerre populaire contre la division et pour protéger la stabilité", écrit le journal.

"Les faits montrent clairement une orchestration minutieuse des forces séparatistes et réactionnaires de l'intérieur et de l'étranger", dont "le but est l'indépendance", indique le "Quotidien du Tibet". "Il faut mettre en lumière la face hideuse du groupe du dalaï lama", ajoute-t-il.

Selon Chine Nouvelle, les autorités chinoises ont reçu dimanche le concours du panchen lama, officiellement numéro deux des dirigeants spirituels tibétains, qu'elles ont elles-mêmes nommé. Le jeune homme, aujourd'hui âgé de 18 ans, a condamné "les actes d'une petite minorité", qui "ont non seulement porté atteinte aux intérêts de la nation et du peuple, mais aussi violé le but du bouddhisme", selon l'agence officielle.

Chine: nouvelles manifestations de Tibétains
Plusieurs Tibétains ont été tués par balles dimanche lors d'une manifestation réprimée par la police à Ngawa, dans un district tibétain de la province du Sichuan (sud-ouest), selon un témoin direct et deux groupes pro-tibétains cité par l'AFP.

"La manifestation a été violemment dispersée. La police a tiré dans la foule. il y a sept morts", affirme Campagne internationale pour le Tibet qui cite des témoins. Le Centre tibétain pour les droits de l'homme et la démocratie parle de "treize morts confirmés", dont dont des moines du monastère Kirti, à Ngawa (Aba en chinois), à 1000 kilomètres au nord-est de Lhassa.

Selon Reuter, qui cite "un policier", 200 manifestants ont incendié un commissariat de police dans la province du Sichuan. Cette région, limitrophe du Tibet, est l'une des quatre provinces chinoises comptant une forte minorité de Tibétains.

"Les manifestants ont attaqué le siège de la police, ont mis le feu à des voitures et la police a tiré (...) J'ai vu trois personnes mortes", a indiqué à l'AFP un résident au téléphone.
"Il y avait 200 personnes qui manifestaient, des moines et des civils tibétains, c'était vers 10 heures (2 h GMT ) ce matin (...). Elles ont d'abord voulu attaquer le bâtiment du gouvernement du district puis elles sont allées à la police", a poursuivi ce témoin.

"Après la prière, les manifestants se sont dirigés vers le centre de la ville et ont scandé des slogans pour la libération du Tibet et le retour du dalaï lama ", selon un porte-parole du Tibet Center for Human Rights and Democracy, basé en Inde.

Samedi, de nouvelles manifestations de moines tibétains avaient éclaté dans le nord-ouest de la Chine. Ces manifestations ont eu lieu dans la province chinoise du Gansu, selon des groupes de défense des Tibétains. "Nous avons eu confirmation de manifestations au monastère de Labrang à Xiahe et les forces de l'ordre sont intervenues avec des gaz lacrymogènes", a indiqué Campagne internationale pour le Tibet. Labrang est l'un des plus grands monastères du bouddhisme tibétain, hors de la région administrative du Tibet administrée par la Chine.

Manifestation de moines boudhistes à Xiahu dans la province chinoise de Gansu (AFP, 14-3-2008))"Des bâtiments officiels ont été détruits, des gaz lacrymogènes ont été tirés, environ 20 personnes ont été arrêtées", a fait savoir de son côté l'organisation Free Tibet Campaign.

Plusieurs milliers de Tibétains avaient déjà manifesté à Xiahe vendredi.

D'autres défilés ont été signalés dans au moins deux autres villes de cette province (Bora et Taktshang) qui abrite plusieurs monastères, selon une autre organisation, Free Tibet Campaign. A Bora, des véhicules auraient été incendiés.

Réactions internationales
Les Etats-Unis et les pays de l'UE ont demandé à la Chine de faire preuve de "retenue" et appelé au respect de la culture tibétaine.

De leur côté, les pays asiatiques, notamment le Japon et la Corée du Sud, se sont abstenus de réagir aux évènements. A la notable exception de Taïwan. "Nous condamnons vivement le recours à la force par la Chine pour réprimer le Tibet et appelons la communauté internationale à suivre de près l'évolution de la situation au Tibet", a déclaré un porte-parole du ministère des Affaires étrangères de l'île que la Chine considère comme partie intégrante de son territoire.

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